CHAPITRE III

COMMENT DOIT SE PRÉPARER ET SE COMPORTER
CELUI QUI VEUT RECEVOIR LE SACREMENT DU CORPS DU SEIGNEUR.

 
Quand un homme de Dieu veut recevoir l'adorable Sacrement de l' Eucharistie, qui nous a été envoyé et donné divinement, qui contient vivant le corps du Seigneur, et que, pour cette raison suprême, nous devons entourer avant toute chose de vénération et d'honneur: anéanti par laprésence du Seigneur son Dieu, qu'il se nourrisse à l'éternelle vérité, examine, scrute, explore sa Vie, ses paroles, ses actes ; et d'un coeur contrit qu'il dise au Seigneur : Ayez pitié de moi, éternelle charité ! Certes, je dois me détester violemment moi-même, car, dès ma plus tendre jeunesse, j'ai mainte fois péché et bien mal employé mon temps : Dieu très clément, ayez pitié de moi ! En vérité, je ne suis pas digne que vous rentriez en ma demeure. (Matth.8 )

Mais pécheur que je suis, tout criblé de blessures, que m'ont fait de Satan les horribles morsures, je ne pourrai jamais recouvrer la santé... A moins que votre bouche qui distille le miel des consolations, ne prononce sur moi, misérable et débile. quelque parole de pitié émanant de votre sublime Majesté.
 

  CHAPITRE IV

DIEU RÉPOND A L'AME AVIDE DE LA SAINTE COMMUNION.

Homme, j'ai entendu ta prière : je ferai donc ce qui est de moi ; je répondrai à ta douleur; et j'agirai selon ton amoureuse confiance.

Que ton âme soit grande, joyeuse et paisible : tous tes voeux seront satisfaits. Car je serai ta nourriture et ton hôte ; mais tu te donneras pleinement à moi. Ma chair a été bien préparée pour toi sur la croix ; mon sang vivifiant et pur pénètre le corps et l'âme. Allons, banquetons ensemble, mangeons et buvons. Mais toi, fais en sorte de te souvenir de ma passion, de ma mort, de mon amour éternel. Car, c'est dans cette occupation et cet exercice, que tu jouiras de la paix : J'ai, en effet, compris par tes paroles, ô mon bien aimé, que tu es désireux de recevoir l'adorable sacrement : Voici que le Sacrifice de la Messe est consommé : Si tu es prêt, reçois (la victime).

Viens te nourrir de moi qui suis le pain de vie !
Dieu seul peut de ton coeur,
Avide de bonheur,
Satisfaire l’envie.
 

CHAPITRE V

L'HOMME PARLE A DIEU
EXALTANT MERVEILLEUSEMENT LA GRACE EUCHARISTIQUE

Soyez béni, Seigneur mon Dieu, qui satisfaites mon désir ! Je reçois volontiers le Sacrement très saint, qui m'est un don précieux - puisque je trouve en lui votre corps sacré, pour moi très doux et très salutaire : il est la manne céleste dont la privation fait mourir (jean 6); il est aussi la nourriture des anges qui donne vraiment la sagesse à ceux qui la goûtent. Mais le monde ne peut pas la goûter, parce qu'il se délecte on s'afflige sans mesure,

De tous les biens du temps qui l'écartent de DIEU..

Il y a à peine un instant, mon Seigneur, vous avez daigné me promettre, que nous mangerions ensemble :

Et j'aspire sans cesse
A ce banquet sacré !
Et mon coeur altéré
Veut enfin se plonger en cette heureuse ivresse,
Dont les divins transports procurent l'allègresse.

Cependant je ne puis vous consumer ; plus je vous mange, plus j'ai faim de vous, et plus je meurs de désir; plus je vous bois, plus j'ai soif de vous ; et il me reste toujours (dans le calice) plus que tous les mortels ne pourraient boire.
Et vous Seigneur vous êtes un hôte très libéral, car vous soldez tout ce qui est consumé.

Combien volontiers, Seigneur, je boirais votre sang qui donne la vie, et qui coule de votre côté sacré et de votre corps très noble et très glorieux ; car il est si suave à mon goût, que je ne puis cacher qu'il m'a déjà presque ennivré . (Cant.1)

En vérité, Seigneur, votre sang est beaucoup plus précieux et plus excellent que tous les vins qui découlent des grappes Puniques ; c'est pourquoi je remplirai tous mes vases, et je serai ainsi magnanime et audacieux; bien que rien au dehors ne me soucie.

Ma coupe est débordante et je désire encore
Quand, pour désaltérer la soif qui me dévore,
Le calice divin
Est toujours aussi plein.
Hélas ! tout ce que j'ai, je ne l'estime guère :
je désire ardemment tout ce que je n'ai pas,
qui se dérobe aux yeux de l'homme sur la terre,
Et qui borne ses pas.
Mais bien que mon désir me poursuive sans trêve,
Un être mesuré ne peut, de son compas,
Atteindre, même en rêve,
Celui qui ne l'est pas.

Car ce qui a une manière (d'être) forme et ce qui n'en a pas, sont deux choses (distinctes) qui ne peuvent jamais en faire une : mais il est nécessaire qu'elles demeurent toujours distinctes et diverses ; car l'une ne saurait nullement se substituer à l'autre .

Mais la foi, l'ordre, les bonnes règles et les saintes institutions sont justement et méritoirement loués. Car les exercices et les réglements de la sainte Eglise visent à tout ordonner, régler et sanctifier ; et nul ne peut, dans le ciel et sur la terre, vivre sans ordre.

Et Dieu lui même règle toute chose dans l'ordre, la manière, le poids et la mesure. C'est pourquoi, suivons les règlements et les institutions raisonnables, afin d'obtenir, au-dessus de la raison, la vie contemplative.