1869

Une médaille de Notre-Dame Auxiliatrice

 

 

Un samedi du mois de mai 1869, une jeune fille, les yeux couverts d'un épais bandeau noir, et guidée par deux autres femmes, entra dans l'église consacrée à Notre-Dame Auxiliatrice, à Turin. Elle se nommait Maria Stardero, du village de Vinovo, et était atteinte, depuis deux ans, d'un mal d'yeux si violent qu'elle avait perdu la vue. Elle ne pouvait se conduire ; sa tante et une voisine l'accompagnaient dans le pèlerinage qu'elle voulut entreprendre.

Après une prière faite à l'autel de la Sainte Vierge, on demande à parler à Don Bosco, et l'entretien suivant s'engage à la sacristie :

— Depuis combien de temps avez-vous mal aux yeux ?

— Il y a longtemps que je souffre ; mais c'est depuis un an environ que je ne vois plus.

— Avez-vous consulté des médecins ? Que disent-ils ? Avez-vous fait des remèdes ?

— Nous avons, répondit la tante, usé de toutes sortes de remèdes, mais aucun n'a procuré le moindre soulagement. Les médecins disent que les yeux sont gâtés, et ils ne donnent aucun espoir.

Et elle se mit à pleurer.

— Distinguez-vous les gros objets des petits ?

— Je ne distingue rien du tout, dit Maria.

— Ôtez ce bandeau, fit alors Don Bosco ; et plaçant la jeune fille en face d'une fenêtre bien éclairée : Voyez-vous la lumière de cette fenêtre ?

— Malheur à moi ! Je ne vois rien du tout.

— Voudriez-vous voir ?

— Est-il besoin de le demander ! Je le désire plus que toute autre chose au monde. Je suis une pauvre jeune fille, et la perte de la vue me rend malheureuse pour le reste de ma vie.

— Vous servirez-vous de vos yeux pour le bien de votre âme, et non pour offenser Dieu ?

— Je le promets de tout mon cœur. Mais mon sort est bien triste...

Et elle éclata en sanglots.

— Ayez confiance en la Sainte Vierge et elle vous aidera.

— Je l'espère, mais en attendant, je suis aveugle.

— Vous verrez.

— Que verrai-je ?

— À la gloire de Dieu et de la bienheureuse Vierge Marie, nommez l’objet que je tiens dans la main.

La jeune fille fait un grand effort des yeux, et fixant l'objet elle s'écrie :

— Je vois.

— Quoi ?

— Une médaille.

— De qui ?

— De la Sainte Vierge.

— Et de cet autre côté de la médaille ?

— De ce côté, un homme âgé avec un bâton fleuri à la main : c'est saint Joseph.

— Sainte Madone, s'écrie la tante, tu vois donc ?

— Mais oui, je vois. Ô mon Dieu ! La sainte Vierge m'a fait cette grâce.

 

En ce moment elle tend la main pour prendre la médaille ; mais celle-ci tombe dans un angle obscur de la sacristie.

La tante se baisse pour la ramasser ; mais Don Bosco s'y oppose :

— Laissez-la faire ; on saura si la sainte Vierge lui a obtenu parfaitement le retour de la vue.

La jeune fille retrouve immédiatement et sans difficulté la médaille. Alors, comme saisie de délire, elle se met à pousser des exclamations de joie, et sans plus rien dire à personne, sans même songer à remercier Dieu, elle part en toute presse pour Vinovo, suivie de sa tante et de l'autre femme qui l'avait accompagnée.

Mais elle ne tarda pas à revenir rendre grâce à la sainte Vierge, sans oublier une offrande pour son église.

 

Depuis ce temps, elle n'a plus souffert des yeux et sa vue a été parfaite.

Fait singulier : la tante qui l'accompagnait, a été simultanément délivrée d'une violente douleur rhumatismale à l'épaule et au bras droit, qui durait depuis fort longtemps et l'avait rendue incapable des travaux de la campagne.