DORMITION DE MARIE DU PSEUDO-JEAN

NOTE SUR LE TEXTE

En 1805, F.-X. Berger, dans un recueil d'histoire et de littérature chrétienne, publiait, en se fondant sur deux manuscrits alors connus, le texte grec de la Dormition de Marie du Pseudo-Jean.
En 1866, K. von Tischendorf, en se fondant sur cinq manuscrits, mais après en avoir consulté une dizaine, faisait paraître une édition nouvelle de ce même texte grec.
Depuis lors, peu de travaux ont porté sur cet écrit dont l'édition critique reste encore à réaliser, d'autant que celle de K. von Tischendorf est loin de fournir toutes les variantes attestées par les nombreux manuscrits, surtout pour l'épilogue.
Malgré l'absence d'édition critique, de nombreuses traductions de l'édition de K. von Tischendorf ont été publiées, mais jamais cet écrit n'a été traduit en français ni en allemand. La présente traduction comble donc une lacune. Elle se fonde aussi sur le travail de K. von Tischendorf. Toutefois, quelques contrôles - non pas une collation - ont été réalisés à partir du manuscrit le plus ancien, actuellement accessible, qui n'était pas alors connu de l'éditeur allemand. En outre, K. von Tischendorf attribuant le numéro 15 à deux paragraphes différents, nous avons numéroté 15a le second.


DORMITION DE MARIE DU PSEUDO-JEAN


DISCOURS DE SAINT JEAN LE THÉOLOGIEN
SUR LA DORMITION DE LA SAINTE MÈRE DE DIEU


VISITE DE MARIE AU TOMBEAU DE JÉSUS

1) La Mère de Dieu, toute sainte, glorieuse et toujours vierge, Marie, allait, selon son habitude, à l'intérieur du saint tombeau de notre Seigneur pour brûler de l'encens. Et, ses saints genoux pliés, elle suppliait le Christ, qui était né d'elle, notre Dieu, pour qu'il revienne vers elle.

2) Or, la voyant fréquenter la divine tombe, les Juifs allèrent trouver les grands prêtres pour leur dire que Marie se rendait tous les jours au tombeau. Les grands prêtres appelèrent les gardiens, qui étaient chargés de ne permettre à personne de prier à l'intérieur du saint tombeau ; ils leur demandèrent si c'était la vérité. Les gardiens répondirent n'avoir jamais rien observé de tel, car Dieu ne leur permettait pas de voir Marie quand elle était là.


APPARITION DE L'ARCHANGE GABRIEL

3) Un jour, un vendredi, sainte Marie se rendit comme d'habitude auprès du tombeau. Pendant qu'elle priait, les cieux s'ouvrirent, et l'archange Gabriel descendit vers elle et lui dit : « Salut, ô toi qui as donné naissance au Christ, notre Dieu ! Ta prière, parvenue aux cieux auprès de celui qui est né de toi, a été exaucée. Dans peu de temps, selon ta demande, tu laisseras le monde, tu partiras vers les cieux, auprès de ton fils, pour la vie véritable et éternelle. »

4) Ayant entendu les paroles du saint archange, elle retourna vers la sainte Bethléem, accompagnée de trois jeunes filles, qui la servaient. Après s'être reposée peu de temps, elle se leva et demanda aux jeunes filles : « Apportez-moi un encensoir afin que je prie. » Celles-ci le lui apportèrent comme elle le leur avait ordonné.

5) Et elle adressa une prière, disant : « Mon Seigneur Jésus Christ, toi qui as daigné dans ta grande bonté être enfanté par moi, écoute ma voix et envoie-moi ton apôtre Jean, pour que sa vue me procure les prémices de la joie. Envoie-moi aussi tes autres apôtres, soit ceux qui sont déjà arrivés près de toi, soit ceux qui sont encore dans ce siècle, quel que soit l'endroit où ils se trouvent par ton saint commandement, afin que je puisse, en les voyant, bénir ton nom célébré par de nombreux hymnes. J'ai confiance, parce qu'en toute chose tu écoutes ta servante. »


RÉUNION DES APÔTRES

6) Pendant qu'elle priait, moi, Jean, j'arrivai, le Saint-Esprit m'ayant enlevé d'Ephèse sur une nuée et posé là où demeurait la mère de mon Seigneur. Entrant, je glorifiai celui qui était né d'elle et je dis : « Salut, ô mère de mon Seigneur, toi qui as donné naissance au Christ, notre Dieu ! Réjouis-toi, car tu quittes cette vie en grande gloire. »

7) Et la sainte Mère de Dieu glorifia Dieu de ce que moi, Jean, j'étais venu auprès d'elle, se rappelant la parole du Seigneur qui déclarait : « Voici ta mère ! » et « Voici ton fils ! ». Les trois jeunes filles s'approchèrent et se prosternèrent.

8) La sainte Mère de Dieu me dit : « Prie et jette de l'encens ! » Je priai ainsi : « Seigneur Jésus-Christ, qui as fait des merveilles, fais encore des merveilles aujourd'hui en présence de celle qui t'a donné naissance : que ta mère quitte cette vie et que soient frappés d'effroi ceux qui t'ont crucifié et qui n'ont pas cru en toi. »

9) La prière terminée, la sainte Marie me dit : « Apporte-moi l'encensoir. » Elle y jeta de l'encens en disant : « Gloire à toi, mon Dieu et mon Seigneur, car s'est accompli pour moi tout ce que tu m'as promis avant de monter aux cieux : « Lorsque je quitterai ce monde, tu viendras vers moi plein de gloire avec la multitude de tes anges. »

10) Moi, Jean, je lui dis : « Notre Seigneur Jésus-Christ et notre Dieu viendra, et tu le verras comme il te l'a promis. » A cela, la sainte Mère de Dieu me répondit, disant : « Les Juifs ont juré que, lorsque j'arriverai au terme de ma vie, ils brûleront mon corps. » Mais moi, je lui répondis : « Ton corps saint et précieux ne connaîtra pas la corruption. » Elle me répondit : « Prends l'encensoir, jette de l'encens et prie. » Une voix venant des cieux dit alors : « Amen. »

11) Moi, Jean, j'écoutai cette voix et le Saint-Esprit me dit : « Jean, as-tu entendu cette voix qui parlait dans le ciel à la fin de ta prière ? » Je répondis en disant : « Oui, je l'ai entendue. » Et le Saint-Esprit me dit : « Cette voix, que tu as entendue, est le signal de l'arrivée imminente de tes frères, les apôtres, et de la sainte Puissance, car aujourd'hui ils viendront ici. »

12) Alors, moi, Jean, je priais pour eux. Et le Saint-Esprit dit aux apôtres : « Pierre de Rome, Paul des bords du Tibre, Thomas du centre de l'Inde, Jacques de Jérusalem, tous arrivés en même temps sur des nuées depuis les extrémités de la terre, soyez réunis dans la sainte Bethléem, à cause de la mère de notre Seigneur Jésus-Christ qui est profondément bouleversée. »

13) André, le frère de Pierre, Philippe, Luc, Simon le Cananéen et Thaddée, qui étaient déjà endormis, furent réveillés de leurs tombeaux par le Saint-Esprit. Le Saint-Esprit leur dit : « Ne croyez pas que c'est maintenant la résurrection. Mais vous avez été ressuscités de votre tombeau pour aller saluer celle à qui honneur et signe merveilleux sont accordés, la mère de votre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ, parce que est arrivé le jour de sa sortie et de son départ pour les cieux. »

14) Marc, qui était encore vivant, vint de même, lui aussi, d'Alexandrie, avec les autres, qui, ainsi qu'il a été dit, arrivaient de chaque région.

15) Pierre, soulevé par une nuée, resta entre ciel et terre, soutenu par le Saint-Esprit, ensemble avec les autres apôtres, qui eux aussi avaient été enlevés sur des nuées, pour se retrouver avec Pierre. Et ainsi, par le Saint-Esprit, comme il a été dit, tous ensemble, ils arrivèrent.

15a) Entrés auprès de la mère de notre Seigneur et Dieu, nous dîmes en nous prosternant : « Ne t'effraie pas et ne t'afflige pas. Le Seigneur Dieu, qui est né de toi, te fera sortir glorieusement de ce monde. » Et elle, se réjouissant en Dieu son Sauveur, se dressa sur son lit et dit aux apôtres : « Maintenant, je crois que notre Maître et Dieu vient des cieux, et je le contemple ; ainsi, puisque je vous ai vus arriver, je quitte cette vie. Pourtant, je veux que vous me disiez comment vous avez eu connaissance de mon départ et comment vous êtes arrivés auprès de moi, et de quelles régions et en combien de temps vous êtes venus, puisque vous vous êtes tant hâtés pour me rendre visite. En effet, il ne me l'a pas caché, celui qui est né de moi, notre Seigneur Jésus-Chrait, le Dieu de toutes choses, car j'ai toujours cru, comme je crois encore, que c'est lui le Fils du Très-Haut. »

16) Pierre répondit en disant aux autres apôtres : « Que chacun raconte à la mère de notre Seigneur ce que le Saint-Esprit nous a annoncé et ordonné. »

17) Et moi, Jean, je répondis par ces mots : « J'étais en train d'approcher du saint autel, à Ephèse, pour servir le Seigneur, lorsque le Saint-Esprit me dit : « Le moment du départ de la mère de ton Seigneur est arrivé. Va à Bethléem pour la saluer. » Une nuée lumineuse m'enleva et me déposa à la porte de la maison où tu demeures. »

18) Et Pierre répondit : « Et moi, me trouvant à Rome, à l'aube, j'entendis une voix venant du Saint-Esprit me disant : « La mère de ton Seigneur doit partir. Le temps est proche. Va à Bethléem pour la saluer. « Et voici qu'une nuée lumineuse m'enleva, je vis les autres apôtres, qui venaient vers moi sur des nuées, et j'entendis une voix, qui me dit : " Partez tous à Bethléem. " »

19) Et Paul, à son tour, dit en réponse : « Et moi, me trouvant dans une ville pas très éloignée de Rome, dans une région des bords du Tibre, j'entendis le Saint-Esprit me disant : " La mère de ton Seigneur est en train de laisser ce monde pour les cieux et de prendre le départ de sa course. Alors, pars, toi aussi, à Bethléem pour la saluer. " Et voici qu'une nuée lumineuse m'enleva et m'amena ou vous êtes. »

20) Et Thomas, à son tour, répondit : « Et moi, alors que je parcourais la terre de l'Inde et que, par la grâce du Christ, la prédication s'affermissait - le fils de la soeur du roi nommé Labdanes était sur le point de se faire marquer du sceau par moi, au palais -, tout à coup, le Saint-Esprit me dit : " Et toi, Thomas, rends-toi à Bethléem pour saluer la mère de ton Seigneur, parce qu'elle va être transférée aux cieux. " Une nuée lumineuse m'enleva et m'amena auprès de vous. »

21) Et Marc, répondant à son tour, déclara : « J'étais en train d'achever le rite de tierce dans la ville d'Alexandrie ; durant la prière, le Saint-Esprit m'enleva et me conduisit auprès de vous. »

22) Et Jacques, à son tour, répondit : « J'étais à Jérusalem, quand le Saint-Esprit m'ordonna : " Rends-toi à Bethléem, parce que la mère de ton Seigneur va partir. " Et voici qu'une nuée lumineuse m'enleva et m'amena auprès de vous. »

23) Et Matthieu, à son tour, répondit par ces mots : « Moi, j'ai glorifié et je glorifie Dieu, car alors que j 'étais sur un bateau, battu par la tempête, et dans une mer furieuse soulevée par les vagues, tout à coup une nuée lumineuse couvrit d'ombre l'agitation de l'orage, ramena le calme de la mer, et moi, elle m'enleva et m'amena auprès de vous. »

24) Ceux qui étaient déjà morts répondirent à leur tour et racontèrent comment ils étaient arrivés. Et Barthélemy dit : « Moi, j'étais en Thébalde, prêchant la parole, lorsque le Saint-Esprit me dit : " La mère de ton Seigneur est en train de partir. Rends-toi donc à Bethléem pour la saluer. " Et, alors, une nuée de lumière m'enleva et m'amena auprès de vous. »

25) Les apôtres dirent tout à la sainte Mère de Dieu, comment et de quelle manière ils étaient arrivés. Ensuite, elle étendit les mains vers le ciel et pria en disant : « J'adore, je loue et je glorifie ton célèbre nom, ô Seigneur, car tu as posé les yeux sur ton humble servante, et toi, le Puissant, tu as fait pour moi de grandes choses. Et voilà que toutes les générations m'appelleront Bienheureuse. »


MIRACLES DE MARIE

26) Et, après la prière, elle dit aux apôtres : « Jetez de l'encens et priez. » Et, pendant qu'ils priaient, un tonnerre vint du ciel et un bruit terrible résonna comme celui de chars. Et voici qu'il y eut une armée d'une multitude d'anges et de puissances, et on entendit une voix comme celle d'un Fils d'Homme. Et les séraphins entourèrent la maison où demeurait la sainte et irréprochable Mère de Dieu et Vierge. Et, ainsi, tous ceux qui étaient à Bethléem virent toutes les merveilles ; et ils allèrent à Jérusalem, et annoncèrent toutes les merveilles qui s'étaient produites.

27) Après la manifestation de cette voix, il arriva que le soleil et la lune apparurent soudainement auprès de la maison et que l'assemblée des tout premiers saints arrivait devant la maison où demeurait la mère du Seigneur, pour l'honorer et la glorifier. Et je vis aussi beaucoup de signes : des aveugles qui voyaient, des sourds qui entendaient ; des boiteux qui marchaient, des lépreux qui étaient purifiés et des possédés d'esprits impurs qui étaient guéris. Et quiconque était affligé de maladies et d'infirmités touchait du dehors le mur de la maison où elle demeurait et criait : « Sainte Marie, qui a donné naissance au Christ, notre Dieu, aie pitié de nous. » Et, à l'instant même, ils étaient guéris.

28) Une grande foule de gens, provenant de toutes les régions et se trouvant à Jérusalem pour la prière, entendit parler des Signes qui se produisaient à Bethléem par la mère du Seigneur. Ils se rendirent sur place, pour implorer la guérison de leurs diverses infirmités. Et ils l'obtinrent. Il y eut ce jour une joie ineffable : la multitude des guéris et des spectateurs glorifiaient le Christ, notre Dieu, et sa mère. De retour de Bethléem, tout Jérusalem était en fête aux chants des psaumes et des hymnes spirituels.


HAINE DES JUIFS

29) Les prêtres des Juifs et avec eux leur peuple furent en fureur à cause de tout ce qui était arrivé. Envahis d'une très violente jalousie, et après avoir à nouveau tenu conseil dans une pensée insolente, ils décidèrent d'envoyer des gens contre la sainte Mère de Dieu et les saints apôtres qui étaient à Bethléem. Lorsque la foule des Juifs, qui s'était mise en marche pour Bethléem, fut à la distance d'un mille environ, il arriva une épouvantable vision et leurs pieds furent entravés. Alors, ils firent demi-tour, retournèrent chez leurs compatriotes et racontèrent toute l'épouvantable vision aux grands prêtres.

30) Encore plus irrités dans leur colère, ils se rendirent chez le gouverneur en criant et disant : « La nation juive est détruite à cause de cette femme : chasse-la de Bethléem et de la province de Jérusalem. » Mais le gouverneur, étonné par les miracles, leur dit : « Moi, je ne la chasse ni de Bethléem ni d'aucun autre lieu. » Mais les Juifs insistèrent en criant et en le conjurant, au nom du salut de Tibère César, d'éloigner les apôtres de Bethléem : « Si tu ne fais pas cela, nous rapporterons l'affaire à César. » Ainsi forcé, le gouverneur envoya un chiliarque contre les apôtres à Bethléem.

31) Mais le Saint-Esprit dit aux apôtres et à la mère du Seigneur : « Voici que le gouverneur a envoyé un chiliarque (chef d'un unité de 1000 hommes) contre vous parce que les Juifs ont provoqué des troubles. Sortez donc de Bethléem et n'ayez pas peur, parce que je vous transporterai sur une nuée à Jérusalem. La puissance du Père, du Fils et du Saint-Esprit est avec vous. »

32) Les apôtres se levèrent tout de suite, Sortirent de la maison en portant la civière de la Maîtresse, Mère de Dieu, et se mirent en route pour Jérusalem. Mais soudainement, comme le Saint-Esprit le leur avait dit, ils furent enlevés sur un nuage et ils se retrouvèrent à Jérusalem dans la maison de la Maîtresse. Et debout, durant cinq jours, nous chantions des hymnes sans interruption.

33) Lorsque le chiliarque arriva à Bethléem et n'y trouva ni la mère du Seigneur ni les apôtres, il arrêta les habitants de Bethléem et leur dit : « N'est-ce pas vous qui êtes venus dire au gouverneur et aux prêtres tous les signes et les miracles qui se sont produits et comment les apôtres sont arrivés de toutes les régions ? Où sont-ils donc ? Allons, venez chez le gouverneur à Jérusalem. » En effet, le chiliarque ignorait que les apôtres et la mère du Seigneur s'étaient retirés à Jérusalem. Le chiliarque prit donc les habitants de Bethléem et se présenta chez le gouverneur, auquel il rapporta n'avoir trouvé personne.

34) Mais, cinq jours plus tard, le gouverneur, les prêtres et toute la ville surent que la mère du Seigneur se trouvait avec les apôtres dans sa maison à Jérusalem, à cause des signes et des merveilles qui se produisaient. Une multitude d'hommes, de femmes et de jeunes filles se réunit en criant : « O Sainte Vierge, qui as donné naissance au Christ, notre Dieu, n'oublie pas le genre humain. »

35) Alors, devant ces événements, le peuple des Juifs comme les prêtres, poussés par leur haine, prirent du bois et du feu et s'avancèrent, voulant brûler la maison où demeurait la mère du Seigneur avec les apôtres. Le gouverneur, cependant, observait de loin le spectacle. Quand le peuple des Juifs atteignit la porte de la maison, voici qu'un jet de hautes flammes sortit de l'intérieur par l'oeuvre d'un ange et brûla une grande multitude de Juifs. La ville entière fut saisie d'une grande peur, et ils glorifiaient le Dieu né de Marie.

36) Le gouverneur, qui avait vu ce qui s'était passé, s'adressa à haute voix à tout le peuple en ces mots : « Vraiment, celui qui est né de la Vierge, de celle que vous avez voulu chasser, est Fils de Dieu. En effet, ces signes sont ceux d'un véritable Dieu. » Les Juifs commencèrent à ne plus être d'accord entre eux : beaucoup crurent au nom de notre Seigneur Jésus-Christ, en raison des signes qui s'étaient produits.


DÉPART DE L'ÂME DE MARIE AU CIEL

37) Après toutes ces merveilles arrivées par l'intermédiaire de la Mère de Dieu et toujours vierge Marie, la mère du Seigneur, alors que nous, les apôtres, étions avec elle à Jérusalem, le Saint-Esprit nous dit : « Vous savez que c'est un dimanche que la bonne nouvelle fut annoncée par l'archange Gabriel à la Vierge Marie ; un dimanche que le Seigneur est né à Bethléem ; un dimanche aussi que les enfants de Jérusalem sortirent à sa rencontre avec des branches de palme en disant : " Hosanna, dans les hauteurs des cieux, béni celui qui vient au nom du Seigneur " ; un dimanche encore qu'il ressuscita des morts ; un dimanche qu'il doit venir pour juger les vivants et les morts ; et un dimanche enfin qu'il doit venir du ciel pour glorifier et honorer le départ de la sainte et glorieuse vierge qui l'a enfanté. »

38) Ce même dimanche, la mère du Seigneur dit aux apôtres : « Jetez de l'encens, car le Christ vient avec une armée d'anges. » Et voici, le Christ se présenta, assis sur le trône des chérubins. Et, pendant que nous étions tous en prière, apparurent une multitude innombrable d'anges et le Seigneur, arrivé au-dessus des chérubins avec une grande puissance. Et voici qu'un éclat de lumière se porta sur la Sainte Vierge par la venue de son Fils unique. Toutes les puissances célestes se prosternèrent et l'adorèrent.

39) Le Seigneur appela sa mère et lui dit : « Marie ! » Elle répondit : « Me voici, Seigneur ! » Et le Seigneur lui dit : « Ne t'afflige pas, mais que ton coeur se réjouisse et soit dans l'allégresse, car tu as obtenu la faveur de contempler la gloire qui me fut donnée par mon Père. » La sainte Mère de Dieu leva les yeux et vit en lui une gloire qu'une bouche humaine ne peut dire ni saisir.
Le Seigneur, restant à côté d'elle, lui dit : « Voici que maintenant ton précieux corps sera transféré au paradis, pendant que ton âme sainte sera aux cieux dans les trésors de mon Père, dans une clarté supérieure, où sont la paix et la joie des anges saints et plus encore. »

40) La mère du Seigneur lui répondit : « Pose ta droite sur moi, Seigneur, et bénis-moi. » Le Seigneur étendit sa droite pure et la bénit. Elle prit sa droite pure, la baisa et dit : « Je vénère cette droite qui a créé le ciel et la terre. J'invoque ton nom très célébré, Christ Dieu, roi des siècles, Fils unique du Père, accueille ta servante, toi qui as daigné être enfanté de moi, l'humble, pour sauver le genre humain selon ton indicible dessein. A tout homme qui invoquera, suppliera ou proférera le nom de ta servante, accorde ton aide. »

41) Pendant qu'elle disait cela, les apôtres, s'approchant de ses pieds et se prosternant, dirent : « Mère du Seigneur, laisse au monde une bénédiction, parce que tu vas l'abandonner. Tu l'as béni et l'as relevé de sa ruine, en donnant naissance à la lumière du monde. » La mère du Seigneur pria ainsi :
« Ô Dieu, dans ta grande bonté, du ciel tu as envoyé ton Fils unique afin qu'il habite dans mon humble corps, toi qui as daigné être enfanté de moi, l'humble, aie pitié du monde et de chaque âme qui invoque ton nom. »

42) Et, de nouveau, elle pria et dit : « Seigneur, roi des cieux, Fils du Dieu vivant, accueille tout homme qui invoque ton nom afin que ta naissance soit glorifiée. »
Et de nouveau, elle pria et dit : « Seigneur Jésus-Christ, qui es tout-puissant au ciel et sur terre, par cette invocation je supplie ton saint nom : en chaque temps et lieu où l'on fera la mémoire de mon nom, sanctifie ce lieu et glorifie ceux qui te glorifient par l'intermédiaire de mon nom, en acceptant d'eux toute offrande, toute supplication et toute prière. »

43) Après qu'elle eut prié ainsi, le Seigneur dit alors à sa mère : « Réjouis-toi, et que ton coeur soit dans l'allégresse car toute grâce et toute gloire te seront accordées par mon Père qui est aux cieux, par moi et par le Saint-Esprit. Toute âme qui invoquera ton nom ne sera pas confuse, mais trouvera miséricorde, consolation, protection et courage dans ce siècle et dans l'avenir, devant mon Père qui est aux cieux. »

44) Alors, le Seigneur se tournant vers Pierre lui dit : « Le moment est venu d'entonner l'hymne. » Quand Pierre entonna l'hymne, toutes les puissances des cieux répondirent par l'Alléluia. Alors, le visage de la mère du Seigneur brilla plus que la lumière. Et, se levant, elle bénit de sa propre main chacun des apôtres. Et tous glorifièrent Dieu. Le Seigneur, étendant ses mains pures, reçut son âme sainte et irréprochable.

45) Et, pendant que sortait cette âme irréprochable, le lieu fut rempli d'un parfum et d'une lumière indicible. Et voici qu'on entendait une voix céleste qui disait : « Bienheureuse es-tu parmi les femmes. » Pierre et moi - Jean - avec Paul et Thomas, nous nous empressons d'embrasser ses précieux pieds pour être sanctifiés. Les douze apôtres, alors, déposèrent son corps précieux et saint dans une bière et l'emportèrent.


OUTRAGE DE JEPHONIAS

46) Et voici, alors qu'ils le portaient, qu'un Hébreu du nom de Jéphonias, vigoureux de corps, s'élança et se saisit de la bière portée par les apôtres. Et voici qu'un ange du Seigneur, par une force invisible, avec une épée de feu, lui trancha les deux mains, les laissant pendre en l'air auprès de la bière.

47) Après cette merveille, tout le peuple des Juifs, qui avait vu, cria : « Il est un vrai Dieu, le fils qui a été enfanté de toi, Marie, Mère de Dieu, toujours vierge ! » Jéphonias aussi, sommé par Pierre de faire connaître les miracles de Dieu, se leva derrière la bière et cria :
« Sainte Marie, toi qui as donné naissance au Christ Dieu, aie pitié de moi. » Et, se tournant, Pierre lui dit : « Au nom de celui à qui elle a donné naissance, tes mains se rattacheront à tes bras, elles qui t'ont été enlevées. » Et, à l'instant même, selon la parole de Pierre, les mains, qui pendaient auprès de la bière de la Maîtresse, retournèrent en arrière et se rattachèrent à Jéphonias. Et il crut et lui aussi glorifia le Christ Dieu à qui elle avait donné naissance.


TRANSFERT DU CORPS DE MARIE AU PARADIS

48) Après que ce miracle se fut produit, les apôtres portèrent la bière et déposèrent le précieux et saint corps à Gethsémani, dans un tombeau neuf. Et voici qu'un parfum délicat se dégagea du saint tombeau de notre Maîtresse, la Mère de Dieu. Et, pendant trois jours, on entendit des voix d'anges invisibles qui glorifiaient le Christ, notre Dieu, né d'elle. Et, le troisième jour achevé, on n'entendit plus les voix. Dès lors, nous sûmes tous que son corps irréprochable et précieux avait été transféré au paradis.


VISITE DES APÔTRES AU PARADIS

49) Après qu'il fut transféré, voici que nous vîmes tous Elisabeth, la mère de saint Jean le Baptiste, et Anne, la mère de la Maîtresse, Abraham et Isaac ainsi que Jacob et David, qui psalmodiaient l'Alléluia, pendant que tous les choeurs des saints vénéraient les précieux restes de la mère du Seigneur. Et nous vîmes un lieu lumineux ; rien n'était plus brillant que cette lumière plus brillante que n'importe quelle autre lumière. Et un parfum abondant montait de ce lieu, où avait été transféré son précieux et saint corps, dans le paradis. Et s'élevait aussi le chant de ceux qui célébraient de leurs hymnes celui qui avait été engendré de Marie. Aux vierges et à elles seules, il était donné d'entendre ce chant si doux qu'on ne pouvait en être rassasié.

50) Nous, les apôtres, ayant vu le transfert soudain et précieux de son saint corps, nous avons glorifié Dieu, qui nous a montré ses merveilles à l'occasion du départ de la mère de notre Seigneur Jésus-Christ. Que par ses prières et son intercession nous soient accordés, à nous tous, sa protection, son soutien et son aide, dans ce siècle et dans l'avenir. Nous rendons ensemble gloire en tout temps et en tout lieu à son Fils unique avec son Père et le Saint-Esprit, pour les siècles des siècles. Amen !


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