VIII

THÉOPHANE  À  STELLA



       Vous pleurez. chère soeur; vous aurez donc encore une joie, car rien n'existe sans son opposé. Bientôt vous sourirez, bientôt vous aurez abandonné un peu de vous-même. Vous ne verserez jamais autant de larmes que vous en avez fait verser à vos frères; sachez bien que la nature n'aurait pas de prise sur nous, si nous ne lui en donnions pas; nous sommes attaqués à peu près autant que nous avons attaqué auparavant, il y a huit jours ou cent siècles; la justice des choses a des comptables scrupuleux et qui n'omettent pas la plus petite de nos incartades.

Mais souvenez-vous que partout où il y a une souffrance, le Verbe s'y trouve. Qu'est-ce qu'une souffrance, en effet, sinon une mort, une transformation, une cure, un dépouillement d'individualisme ?

Pourquoi donc pleurer ? direz-vous.
Ah ! chère soeur, pleurez non à cause des douleurs que vous subissez, mais pleurez d'amour repentant et de compassion; perdez-vous, sombrez, précipitez-vous d'une chute éperdue dans les gouffres de l'humilité et de l'holocauste.

Alors vous goûterez la saveur rafraîchissante et sereine de la paix; les battements des ailes angéliques viendront rafraîchir votre coeur; vous dormirez dans les bras des messagers divins et votre esprit sera conduit vers les montagnes sacrées dont les océans des forces et des essences astrales battent les flancs sans les entamer.