Quatrième Partie (B) :
LA CREATION DE L'UNIVERS

Tous les usages, qui sont les fins de la création,
sont dans des formes, formes qu'ils prennent
des substances et des matières, telles
qu'elles sont dans les terres.

    307. Toutes les choses dont il a été parlé jusqu'à présent, par exemple, celles concernant le soleil, les atmosphères et les terres, sont seulement des moyens pour les fins. Les fins de la création sont les choses qui sont produites de la terre par le Seigneur comme Soleil au moyen des atmosphères, et ces fins sont nommées usages. Ce sont dans leur extension toutes les choses du règne végétal, toutes celles du règne animal et enfin le genre humain et le ciel angélique qui en provient. Ces choses sont nommées usages, parce qu'elles sont les réceptacles du Divin Amour et de la Divine Sagesse, et aussi parce qu'elles se tournent vers Dieu Créateur de qui tout procède, et par là Le conjoignent à sa grande œuvre, et par la conjonction font que par Lui elles subsistent de même que par Lui elles ont pris existence. S'il est dit, qu'elles se tournent vers Dieu Créateur de qui tout procède, et Le conjoignent à sa grande œuvre, ce n'est que d'après l'apparence, car il est entendu que Dieu Créateur fait qu'elles se tournent et se conjoignent comme d'elles-mêmes. Il sera dit dans la suite comment cela se fait. Mais il a été montré précédemment que le Divin Amour et la Divine Sagesse ne peuvent qu'être et exister en d'autres, créées par eux, N°s 47 à 51 ; que toutes les choses dans l'univers créé sont des réceptacles du Divin Amour et de la Divine Sagesse, N°s 55 à 60 ; que les usages de toutes les choses qui ont été créées montent par les degrés jusqu'à l'homme, et par l'homme jusqu'à Dieu Créateur de qui tout procède, N°s 65 à 68.

    308. Tout homme voit clairement que les usages sont les fins de la création, lorsqu'il considère que par Dieu Créateur il ne peut exister, ni par conséquent être créé, autre chose que l'usage ; et qu'afin d'être un usage, il doit servir à d'autres ; et que l'usage pour soi est aussi pour d'autres, car l'usage pour soi met en état d'être utile à d'autres. Alors il peut aussi considérer que l'usage qui est usage, ne peut exister par l'homme, mais qu'il existe chez l'homme d'après celui par lequel tout ce qui existe est usage, ainsi par le Seigneur.

    309. Il sera parlé maintenant des formes des usages I. Dans les terres il y a un effort pour produire les usages dans les formes, c'est-à-dire, produire les formes des usages. II. Dans toutes les formes des usages il y a une certaine image de la création. III. Dans toutes les formes des usages il y a une certaine image de l'homme. IV. Dans toutes les formes des usages il y a une certaine image de l'Infini et de l'Eternel.

    310. I. Dans les terres il y a un effort pour produire les usages dans les formes, c'est-à-dire produire les formes des usages. D'après l'origine des terres, on voit qu'en elles il y a cet effort, en ce que les substances et les matières dont elles proviennent sont les fins et les terminaisons des atmosphères qui procèdent du Soleil spirituel comme usages, voir ci-dessus, N°s 305, 306 ; et puisque les substances et les matières dont proviennent les terres, ont cette origine, et que leurs assemblages sont tenus en un lien par la pression des atmosphères, il s'ensuit que de là leur vient un effort perpétuel pour produire des formes des usages. Cette qualité de pouvoir produire, elles la tiennent de leur origine, savoir, de ce qu'elles sont les derniers des atmosphères, avec lesquelles par conséquent elles concordent. Il est dit que cet effort et cette qualité sont dans les terres, mais il est entendu qu'ils sont dans ces substances et dans ces matières dont proviennent les terres, soit qu'elles se trouvent dans les terres, soit qu'exhalées des terres elles se trouvent dans les atmosphères. Il est bien connu que les atmosphères sont remplies de ces substances et de ces matières. On voit clairement qu'il y a un tel effort et une telle qualité dans les substances et dans les matières de la terre, en ce que les semences de tout genre, ouvertes au moyen de la chaleur jusqu'à leur intime, sont imprégnées de substances très subtiles, qui ne peuvent être que d'une origine spirituelle, et par là en puissance de se conjoindre à l'usage, d'où résulte leur principe prolifique. Alors par la conjonction avec les matières d'origine naturelle, elles peuvent produire des formes des usages, les faire sortir ensuite comme d'un utérus, afin qu'elles viennent aussi à la lumière, et ainsi germent et croissent. Cet effort est ensuite continuel d'après les terres par la racine jusqu'aux derniers, et des derniers aux premiers, dans lesquels l'usage lui-même est dans son origine. C'est ainsi que les usages passent dans les formes. Et les formes tiennent de l'usage, qui est comme l'âme, que, dans la progression des premiers aux derniers et des derniers aux premiers, toutes et chacune de leurs parties soient de quelque usage. Il est dit que l'usage est comme l'âme, parce que la forme de l'usage est comme le corps. Il s'ensuit qu'il y a un effort encore plus intérieur qui est l'effort pour produire des usages pour le règne animal par des germinations, car les animaux de tout genre se nourrissent de plantes. Il s'ensuit encore qu'il y a aussi en elles un effort intime, qui est l'effort pour remplir un usage pour le genre humain. Il résulte de tout cela, Il qu'il y a des derniers, et que dans les derniers il y a simultanément dans leur ordre les antérieurs, selon ce qui a plusieurs fois été montré ci-dessus. 2° Qu'il y a les degrés des deux genres dans les très grands et dans les très petits de toutes choses, (N°s 222 à 229), et qu'ils sont pareillement dans cet effort. Que puisque tous les usages sont produits par le Seigneur, dans les derniers il doit y avoir un effort pour les usages.

    311. Néanmoins tous ces efforts ne sont pas vivants, car ce sont les efforts des forces dernières de la vie, forces dans lesquelles d'après la vie dont elles proviennent, il y a enfin une tendance à revenir à leur origine par les moyens offerts. Dans les derniers, les atmosphères deviennent de telles forces par lesquelles les substances et les matières, telles qu'elles sont dans les terres, sont mises en action pour constituer des formes, et y sont maintenues tant par dedans que par dehors. Ce sujet étant d'une vaste étendue, ne peut être developpé maintenant.

    312. La première production sortie de ces terres, quand elles étaient encore récentes et dans leur simplicité, a été la production des semences ; le premier effort ne pouvant être rien d'autre.

    313. II. Dans toutes les formes des usages il y a une certaine image de la création. Les formes des usages sont de trois genres : celles du règne minéral, celles du règne végétal et celles du règne animal. Les formes des usages du règne minéral ne peuvent être décrites, parce qu'elles ne se montrent pas à la vue. Les premières formes sont les substances et les matières dont proviennent les terres, dans leurs très petites parties ; les secondes formes en sont des assemblages, qui sont d'une variété infinie ; les troisièmes formes proviennent de végétaux tombés en poussière et d'animaux morts, de leurs évaporations et de leurs exhalaisons continuelles qui se joignent aux terres, et en font l'humus. Ces formes des trois degrés du règne minéral représentent en image la création, en ce que, mises en action par le soleil au moyen des atmosphères, et au moyen de la chaleur et de la lumière des atmosphères, elles produisent dans des formes les usages, qui ont été les fins de la création. Cette image de la création repose profondément cachée dans leurs efforts, dont il vient d'être parlé au 310.

    314. Dans les formes des usages du règne végétal, l'image de la création se montre, en ce que ces formes procèdent de leurs premiers vers leurs derniers et de leurs derniers vers leurs premiers. Leurs premiers sont les semences, et leurs derniers sont les tiges recouvertes d'écorce ; et par l'écorce, qui est le dernier des tiges, elles tendent aux semences, qui, comme il a été dit, sont leurs premiers. Les tiges recouvertes d'écorces ressemblent au globe recouvert de terres d'après lesquelles existent la création et la formation de tous les usages. On sait généralement que les végétations se font par les écorces, premières et secondes, par les tuniques, en faisant effort par les enveloppes des racines continuées autour des tiges et des branches, pour les commencements des fruits, et par les fruits pour les semences. Dans les formes des usages, l'image de la création se manifeste dans la progression de leur formation des premiers vers les derniers, et des derniers vers les premiers, puis en ce que dans toute progression il y a la fin de produire les fruits et les semences, qui sont les usages. D'après ce qui précède, il est évident que la progression de la création de l'univers a été de son Premier, qui est le Seigneur entouré du soleil, vers les derniers qui sont les terres, et de celles-ci par les usages vers le Premier ou le Seigneur ; et que les fins de toute la création ont été les usages.

    315. Il faut qu'on sache que la chaleur, la lumière et les atmosphères du monde naturel, ne font absolument rien pour cette image de la création, mais que seules la chaleur, la lumière et les atmosphères du soleil du monde spirituel portent avec elles cette image, et elles l'introduisent dans les formes des usages du règne végétal. La chaleur, la lumière et les atmosphères du monde naturel ouvrent seulement les semences, tiennent les productions de ces semences dans un état de croissance, et les habillent de matières qui leur donnent la fixité. Elles le font, non par les forces provenant de leur soleil, lesquelles, considérées en elles-mêmes, sont nulles, mais par les forces procédant du soleil spirituel, par lesquelles les forces naturelles sont perpétuellement poussées vers cette croissance. Les forces naturelles ne contribuent nullement à la formation de cette image de la création, car l'image de la création est spirituelle. Mais pour qu'elle apparaisse et accomplisse l'usage dans le monde naturel, et pour qu'elle soit fixe et durable, elle doit être jointe à la matière, c'est-à-dire garnie de matières de ce monde.

    316. Dans les formes des usages du règne animal il y a une semblable image de la création, par exemple, en ce que de la semence, déposée dans l'utérus ou dans l'œuf, est formé le corps, qui en est le dernier, et que celui-ci, lorsqu'il a atteint sa croissance, produit de nouvelles semences. Cette progression est semblable à celle des formes des usages du règne végétal : les semences sont les commencements, l'utérus ou l'œuf est comme la terre, l'état avant l'enfantement est comme l'état de la semence dans la terre quand elle prend racine, l'état après la naissance jusqu'à la prolification est comme la croissance de l'arbre jusqu'à son état de fructification. D'après ce parallélisme il est évident qu'il y a aussi une ressemblance de la création dans les formes des animaux comme il y en a une dans les formes des végétaux, à savoir qu'il y a une progression des premiers vers les derniers, et des derniers, vers les premiers. Une semblable image de la création existe dans chacune des choses qui sont dans l'homme, car il y a une semblable progression de l'amour par la sagesse vers les usages, par conséquent une semblable progression de la volonté par l'entendement vers les actes, et de la charité par la foi vers les œuvres. La volonté et l'entendement, et aussi la charité et la foi, sont les premiers, les actes et les œuvres sont les derniers ; de ceux-ci par les plaisirs des usages se fait le retour vers leurs premiers, qui, ainsi qu'il a été dit, sont la volonté et l'entendement, ou la charité et la foi. On voit clairement que le retour se fait par les plaisirs des usages, en raison des plaisirs ressentis dans l'accomplissement des actes et des œuvres qui appartiennent à chaque amour, en ce qu'ils refluent vers le premier de l'amour dont ils procèdent, et que par là se fait la conjonction. Les plaisirs des actes et des œuvres sont des plaisirs qui sont appelés usages. Une semblable progression des premiers vers les derniers, et des derniers vers les premiers se fait voir dans les formes le plus purement organiques des affections et des pensées chez l'homme. Dans ses cerveaux ces formes sont comme des étoiles, elles sont appelées substances cendrées. De ces substances sortent des fibres qui, par la substance médullaire à travers le cou passent dans le corps et vont jusqu'aux derniers, et des derniers retournent aux premiers, retour qui se fait par les vaisseaux sanguins. Il y a une semblable progression de toutes les affections et de toutes les pensées, qui sont les changements et les variations de l'état de ces formes et de ces substances ; car les fibres, sortant de ces formes ou de ces substances, sont par comparaison comme les atmosphères procédant du soleil spirituel, qui sont les contenants de la chaleur et de la lumière ; et les actes procédant du corps sont comme les choses qui sont produites des terres par les atmosphères, et dont les plaisirs des usages retournent vers leur origine. Mais l'entendement peut difficilement comprendre qu'il y ait une semblable progression de ces choses, et qu'il y ait une image de la création dans cette progression, parce que des milliers et des myriades de forces, qui opèrent dans l'acte, apparaissent comme un, et parce que les plaisirs des usages ne présentent pas des idées dans la pensée, mais affectent seulement sans une perception distincte. Voir sur ce sujet ce qui a été dit et montré précédemment, par exemple, que les usages de toutes les choses qui ont été créées montent par les degrés de hauteur jusqu'à l'homme, et par l'homme jusqu'à Dieu Créateur de qui tout procède, N°s 65 à 68 ; et que dans les derniers existe la fin de la création, qui est, que toutes choses retournent au Créateur, et qu'il y ait conjonction, N°s 167 à 172. Mais ceci se présentera dans un jour encore plus clair dans la partie suivante, où il sera traité de la correspondance de la volonté et de l'entendement avec le cœur et le poumon.

317. III. Dans toutes les formes des usages il y a une certaine image de l'homme. Cela a été montré ci-dessus aux N°s 61 à 64. On verra dans l'article suivant que tous les usages depuis les premiers jusqu'aux derniers, et depuis les derniers jusqu'aux premiers ont un rapport avec toutes les choses de l'homme, et une correspondance avec elles, et que par suite l'homme est en une certaine image un univers, et que réciproquement l'univers considéré quant aux usages est en image un homme.

    318. IV. Dans toutes les formes des usages il y a une certaine image de l'Infini et de l'Eternel. L'image de l'infini dans ces formes se manifeste clairement par l'effort et la puissance de remplir les espaces de tout le globe, et même de tous les globes, à l'infini. Car d'une seule semence est produit un arbre, un arbrisseau ou une plante qui remplit son espace et produit d'autres semences. Si chacune de ces semences reproduisait autant d'autres, après un certain nombre d'années le globe entier serait rempli de leur production ; et si les productions étaient encore continuées, un grand nombre de globes en serait rempli, et cela à l'infini. L'image de l'Eternel est aussi dans ces formes, en ce que les semences se propagent d'année en année sans interruption depuis la création du monde, et elles ne cesseront jamais. Ces deux faits sont des indices éminents et des signes certains que tout dans l'univers a été créé par un Dieu Infini et Eternel, Outre ces images de l'Infini et de l'Eternel, il y a encore une image de l'Infini et de l'Eternel dans les variétés, en ce que, dans l'univers créé, il ne peut jamais y avoir une substance, un état ou un objet qui soit le même qu'un autre, ou identique à un autre. Dans les atmosphères, dans les terres et dans les formes qui en tirent leur origine, par conséquent parmi tous les objets qui remplissent l'univers, il ne peut non plus être produit durant l'éternité une chose qui soit la même qu'une autre. On le voit bien clairement dans la variété des faces de tous les hommes ; il n'y en a pas une qui soit identique à une autre sur tout le globe, et il en sera ainsi durant l'éternité. Par conséquent, aucun mental n'est le même qu'un autre, car la face est l'image du mental.
 
 

Toutes les choses de lunivers créé considérées
d'après les usages, représentent en image
l'homme ; et cela atteste que Dieu
est Homme.

    319. L'homme a été appelé microcosme par les anciens, parce qu'il représente le macrocosme, qui est l'univers dans tout le complexe. Mais aujourd'hui on ne sait pas pourquoi l'homme a été ainsi appelé, car rien de l'univers ou du macrocosme ne se manifeste en lui, sauf qu'il tire sa nourriture et sa vie quant au corps, du règne animal et du règne Végétal de l'univers, qu'il est tenu en état de vivre d'après sa chaleur, qu'il voit par sa lumière et qu'il entend et respire par ses atmosphères. Mais cela ne fait pas que l'homme soit un microcosme, à l'instar de l'univers avec tout ce qu'il contient, qui est le macrocosme. Les anciens ont appelé l'homme microcosme ou petit univers d'après les vérité, qu'ils ont puisées dans la science des correspondances dans laquelle avaient été les très anciens et dans la communication avec les anges du ciel ; car, d'après les objets visibles qui les entourent, les anges du ciel savent que toutes les choses de l'univers, considérées quant aux usages, représentent en image l'homme.

    320. Mais d'après l'idée de l'univers considéré dans le monde spirituel, que l'homme est un microcosme ou petit univers parce que l'univers créé vu quant aux usages est en image un homme, personne ne peut le penser, et par suite le croire. Seul un ange peut le confirmer, ou quelqu'un à qui il a été donné d'être dans le monde spirituel et de voir les choses qui y sont. Comme cela m'a été donné, je peux révéler cet arcane d'après ce que j'y ai vu.

    321. Il faut qu'on sache que le monde spirituel dans son apparence externe est absolument semblable au monde naturel. On y voit des terres, des montagnes, des collines, des fleuves, des fontaines, comme dans le monde naturel, ainsi toutes les choses qui sont du règne minéral. On y voit aussi des paradis, des jardins, des forêts, des bocages, dans lesquels il y a des arbres et des arbrisseaux de tout genre avec fruits et semences, et des plantes, des fleurs, des herbes et des gazons, ainsi toutes les choses qui sont du règne végétal. On y voit des animaux, des oiseaux et des poissons de tout genre, ainsi toutes les choses qui sont du règne animal. L'homme y est ange ou esprit. Ceci est dit par avance, afin qu'on sache que l'univers du monde spirituel est absolument semblable à celui du monde naturel, avec la seule différence que les choses n'y sont pas fixes ni stationnaires comme le sont celles du monde naturel, parce que là rien n'est naturel, mais tout est spirituel.

    322. On peut voir clairement que l'univers du monde spirituel représente en image l'homme, en ce que toutes les choses dont il vient d'être parlé au N°s 321, apparaissent vivantes et existent autour de l'ange et autour des sociétés angéliques, comme produites ou créées par eux ; elles restent autour d'eux et ne s'en éloignent pas. On voit qu'elles sont comme produites ou créées par eux, parce qu'elles n'apparaissent plus lorsque l'ange se retire, ou que la société passe ailleurs ; puis en ce que l'apparence de toutes choses est changée quand d'autres anges viennent à cette place. Les jardins paradisiaques sont changés quant aux arbres et aux fruits ; les parterres quant aux fleurs et aux semences ; les champs quant aux herbes et aux graminées ; les espèces d'animaux et d'oiseaux le sont aussi. De telles choses existent et sont ainsi changées, parce qu'elles existent selon les affections des anges et selon leurs pensées provenant des affections, car elles sont des correspondances ; et comme les choses qui correspondent font un avec ce à quoi elles correspondent, c'est pour cela qu'elles en sont une image représentative. L'image elle-même n'apparait pas quand toutes ces choses sont considérées dans leurs formes, mais elle apparait quand elles sont considérées dans les usages. Il m'a été donné de voir que les anges, quand leurs yeux étaient ouverts par le Seigneur, et qu'ils voyaient ces choses d'après la correspondance des usages, se reconnaissaient et se voyaient eux-mêmes en elles.

    323. Maintenant, puisque les choses qui existent autour des anges selon leurs affections et leurs pensées, représentent une sorte d'univers, en ce qu'elles sont des terres, des plantes et des animaux, et qu'elles font une image représentative de l'ange, on voit clairement pourquoi les anciens ont ont appelé l'homme microcosme.

    324. Qu'il en soit ainsi, cela a été confirmé maintes fois dans les ´Arcanes Célestesª, dans le traité ´Le ciel et l'enferª, et même dans ce qui précède, quand il a été question des correspondances. Il a été montré qu'il n'y a rien dans l'univers créé, qui n'ait une correspondance avec quelque chose de l'homme, non seulement avec ses affections et par suite avec ses pensées, mais aussi avec les organes et les viscères de son corps ; néanmoins cette correspondance se fait non avec leurs substances, mais avec leurs usages. De là vient que dans la Parole, lorsqu'il s'agit de l'église et de l'homme de l'église, il est si souvent fait mention d'arbres, tels qu'oliviers, ceps et cèdres, et de jardins, de bocages et de forêts, comme aussi d'animaux de la terre d'oiseaux du ciel et de poissons de la mer. Il y est fait mention de ces choses, parce qu'elles correspondent, et qu'elles font un par correspondance, ainsi qu'il a été dit. Pour cette même raison, lorsque ces choses sont lues dans la Parole par l'homme, les anges ne les perçoivent pas, mais à leur place ils perçoivent l'église, ou les hommes de l'église quant à leurs états.

    325. Comme toutes les choses de l'univers représentent en image l'homme, Adam est décrit quant à la sagesse et à l'intelligence par le jardin d'Eden, où étaient des arbres de toute espèce, des fleuves, des pierres précieuses et de l'or, et des animaux auxquels il donna des noms. Par toutes ces choses sont entendues celles qui étaient chez lui, et constituaient ce qui est nommé l'homme. Dans Ezechiel XXXI, 3 à 9, des choses presque semblables sont dites d'Aschur, par qui est signifiée l'église quant à l'intelligence ; et de Tyr, par qui est signifiée l'église quant aux connaissances du bien et du vrai, - Ezechiel, XXVIII, 12, 13.

    326. D'après ces explications, on peut voir que toutes les choses de l'univers, considérées d'après les usages, représentent en image l'homme, et que cela atteste que Dieu est Homme ; car ces choses mentionnées ci-dessus, existent autour de l'homme-ange, non d'après l'ange, mais d'après le Seigneur par l'ange. En effet, elles existent d'après l'influx du Divin Amour et de la Divine Sagesse du Seigneur dans l'ange, qui est réceptacle, et devant ses yeux elles font voir comme une création de l'univers. Par là les anges savent que Dieu est Homme, et que l'univers créé, considéré quant aux usages, est l'image de Dieu.

Toutes les choses qui ont été créées par le
Seigneur sont des usages. Elles sont des usages
dans l'ordre, dans le degré et dans le rapport
où elles se réfèrent à l'homme, et par l'homme
au Seigneur de qui elles proviennent.

    327. Il a été dit sur ce sujet, que par Dieu Créateur il ne peut exister autre chose que l'usage, N° 308 ; que les usages de toutes les choses qui ont été créées montent par degrés depuis les derniers jusqu'à l'homme, et par l'homme jusqu'à Dieu Créateur de qui tout procède, N°s 65 à 68 ; que dans les derniers existe la fin de la création, qui est que toutes choses retournent à Dieu Créateur, et qu'il y ait conjonction, N°s 167 à 172 ; que les choses sont des usages, en tant qu'elles se tournent vers le Créateur, 307 ; que le Divin ne peut qu'être et exister dans d'autres créés par Lui, N°s 47 à 51 ; que toutes les choses de l'univers sont des réceptacles selon les usages, et cela selon les degrés, 58 ; que l'univers, considéré d'après les usages, est l'image de Dieu, N° 59 ; outre plusieurs autres choses. Il en résulte évidemment cette vérité que toutes les choses qui ont été créées par le Seigneur sont des usages, et qu'elles sont des usages dans l'ordre, dans le degré et dans le rapport où elles se réfèrent à l'homme, et par l'homme au Seigneur de qui tout procède. Il reste à dire ici quelque chose de particulier sur les usages.

    328. Par l'homme auquel les usages se réfèrent, il est entendu non seulement un homme, mais aussi une réunion d'hommes, une société petite ou grande, comme une république, un royaume, un empire, et aussi la société la plus grande qui est le monde entier, car chacun d'eux est un homme. Il en est de même dans les cieux : Devant le Seigneur tout le ciel angélique est comme un seul homme, et chaque société du ciel l'est aussi ; il en résulte que chaque ange est un homme. On voit qu'il en est ainsi dans le traité ´Le ciel et l'enferª, N°s 68 à 103. Cette explication fait voir clairement ce qui est entendu par l'homme dans ce qui suit.

    329. Par la fin de la création de l'univers on peut voir en quoi consiste les usages. La création de l'univers a pour fin l'existence du ciel angélique ; et parce que le ciel angélique est la fin, l'homme ou le genre humain l'est aussi, puisque le ciel en est composé. Il s'ensuit que toutes les choses qui ont été créées sont des fins moyennes, et que ces fins sont des usages dans l'ordre, dans le degré et dans le rapport oùelles se réfèrent à l'homme, et par l'homme au Seigneur.

    330. Puisque la fin de la création est le ciel angélique provenant du genre humain, ainsi le genre humain lui-même, toutes les autres choses créées sont par conséquent des fins moyennes, qui, parce qu'elles se réfèrent à l'homme, concernent ces trois plans de l'homme, son corps, son rationnel, son spirituel, Pour la conjonction avec le Seigneur. En effet, l'homme ne peut être conjoint au Seigneur s'il n'est spirituel ; et il ne peut être spirituel s'il n'est rationnel ; et il ne peut être rationnel si le corps n'est pas dans un état de santé. Ces choses sont comparables à une maison, le corps en serait le fondement, le rationnel la maison construite dessus, le spirituel les choses qui sont dans la maison, et la conjonction avec le Seigneur serait le fait d'y habiter. Ainsi on voit en quel ordre, en quel degré et en quel rapport, les usages qui sont les fins moyennes de la création, se réfèrent à l'homme, savoir, pour soutenir son corps, perfectionner son rationnel, et recevoir du Seigneur le spirituel.

    331. Les usages pour soutenir le corps se réfèrent à sa nourriture, son vêtement, son habitation, sa récréation et son amusement, sa protection et la conservation de son état. Les usages créés pour la nourriture du corps sont toutes les choses du règne végétal, qui se mangent et se boivent, et aussi celles du règne animal, comme les viandes, le lait et les poissons. De nombreuses choses tirées de ces deux règnes sont des usages créés pour le vêtement et pour les autres nécessités du corps ; étant connues, elles ne seront pas énumérées. Il y a, il est vrai beaucoup de choses qui ne sont pas utiles à l'homme ; toutefois les choses superflues ne suppriment pas l'usage, mais en assurent la continuité. Il y a aussi l'abus des usages, mais l'abus ne supprime pas l'usage, de même que la falsification du vrai ne supprime pas le vrai, si ce n'est chez ceux qui font la falsification.

    332. Les usages pour perfectionner le rationnel sont toutes les choses qui enseignent ce dont il vient d'être parlé, et qui sont nommées connaissances et études ; elles se réfèrent aux choses naturelles, économiques, civiles et morales qui sont acquises des parents et des maîtres, des livres, des relations avec les autres, ou en soi-même par des réflexions. Ces choses perfectionnent le rationnel, en tant qu'elles sont des usages dans un degré supérieur, et elles subsistent dans la mesure où elles sont appliquées à la vie. Enumérer ces usages serait inutile, à cause de leur grand nombre et de leur rapport varié avec le bien commun.

    333. Les usages pour recevoir du Seigneur le spirituel sont toutes les choses qui appartiennent à la religion, et par suite au culte, ainsi celles qui enseignent la connaissance et la reconnaissance de Dieu, la connaissance et la reconnaissance du bien et du vrai, et ainsi la vie éternelle. Ces choses, comme les autres enseignements, sont acquises des parents, des maîtres, des prédicateurs et des livres, et principalement de l'application à y conformer sa vie ; et dans le monde chrétien par les doctrines et les prédications d'après la Parole, et par la Parole d'après le Seigneur. Ces usages, dans toute leur étendue, peuvent être décrits par les termes mêmes qui ont été employés pour les usages du corps, pourvu qu'ils soient appliqués à l'âme, ainsi la nourriture aux biens de l'amour, le vêtement aux vrais de la sagesse, l'habitation au ciel, la récréation et l'amusement à la félicité de la vie et à la joie céleste, la protection aux maux qui infestent, et la conservation de l'état à la vie éternelle. Toutes ces choses sont données par le Seigneur, dans la mesure où l'on reconnaît que toutes celles qui appartiennent au corps sont données aussi par le Seigneur, et que l'homme est seulement comme un serviteur et un ministre économe établi sur les biens de son Maître.

    334. On voit clairement d'après l'état des anges dans les cieux que ces choses ont été données à l'homme, pour son usage et son plaisir, puisque les anges ont un corps un rationnel et un spirituel comme les hommes de la terre. Ils sont nourris gratuitement, car chaque jour il leur est donné de la nourriture ; ils sont vêtus gratuitement, car il leur est donné des vêtements ; ils sont logés gratuitement, car il leur est donné des maisons ; ils n'ont aucun souci pour toutes ces choses, et autant ils sont rationnels-spirituels, autant ils ont l'amusement, la protection et la conservation de l'état. Mais les anges voient que ces choses viennent du Seigneur, parce qu'elles sont créées selon l'état de leur amour et de leur sagesse, comme il a été montré au 322, tandis que les hommes ne le voient pas, parce que les récoltes reviennent chaque année, et existent non selon l'état de leur amour et de leur sagesse, mais selon leurs soins.

    335. Bien que ces choses soient appelées des usages, parce que par l'homme elles se réfèrent au Seigneur, néanmoins on ne peut pas dire que les usages viennent de l'homme pour le Seigneur, mais du Seigneur pour l'homme, parce que tous les usages sont infiniment un dans le Seigneur, et qu'il n'y en a aucun dans l'homme si ce n'est d'après le Seigneur car l'homme ne peut faire le bien d'après lui-même, mais le fait d'après le Seigneur, et le bien est ce qui est appelé usage. L'essence de l'amour spirituel est de faire du bien aux autres, non pour soi mais pour eux ; l'essence du Divin Amour le fait donc infiniment plus. Cela est semblable à l'amour désintéressé des parents pour leurs enfants, et particulièrement à celui de la mère. On croit que le Seigneur, parce qu'on doit L'adorer, Lui rendre un culte et Le glorifier, aime l'adoration, le culte et la gloire pour Lui-Même ; mais Il les aime pour l'homme, parce que l'homme en le faisant, vient dans un état où le Divin peut influer et être perçu, car l'homme alors éloigne le propre qui empêche l'influx et la réception ; en effet, le propre qui est l'amour de soi, endurcit le cœur et le ferme. Ce propre est éloigné par la reconnaissance que de soi-même il ne vient que du mal, et que du Seigneur il ne vient que du bien. Cette reconnaissance provoque l'attendrissement du cœur et l'humiliation, d'où découlent l'adoration et le culte. Il s'ensuit que le Seigneur remplit les usages pour Lui-Même par l'homme, afin que l'homme par amour puisse faire le bien, et comme c'est là l'amour du Seigneur, sa réception par l'homme est le plaisir de l'amour du Seigneur. Qu'on ne croie donc pas que le Seigneur soit chez ceux qui seulement l'adorent, mais que l'on croie qu'il est chez ceux qui font ses commandements, par conséquent des usages. Il fait sa demeure chez ceux-ci, mais non chez ceux-là. Voir aussi ce qui a été dit sur ce sujet aux N°s 47, 48, 49.