CHAPITRE PREMIER
 

Seul avec le Maître


     1. Ce n'était pas seulement pour leur procurer du repos que le Maître emmena ses trois disciples préférés sur le sommet de la montagne, c'était avant tout pour leur donner comme une vision de la réalité de la gloire de sa nature divine. Jusqu'à ce moment-là, le contact journalier qu'avaient eu ces trois hommes avec Jésus leur avait été une préparation à cette révélation. Témoins de ses miracles, ils avaient entendu les paroles merveilleuses que personne n'avait prononcées avant lui, mais il fallait davantage encore pour les courber dans l'adoration et dans un étonnement qui touchait à l'ahurissement. Il leur était absolument nécessaire d'abandonner leurs occupations quotidiennes pour contempler dans la calme solitude de la montagne la gloire transcendante de la personnalité divine du Christ. Mais cette transfiguration physique n'aurait pas suffi à conduire les disciples au but que s'était proposé le Christ, il fallait que leurs yeux spirituels fussent ouverts. Sinon ils n'auraient pas été plus capables de contempler la face du Christ que de discerner la présence de Moïse et d'Élie. Leurs oreilles durent aussi être ouvertes, sans cela il ne leur eût pas été possible d'entendre ces hommes s'entretenir du « départ que le Christ allait accomplir à Jérusalem , ni de percevoir la voix de Dieu elle-même disant: « Celui-ci est mon Fils élu, écoutez le. » (Luc IX, 28 à 36.)

     Dieu s'est fait homme en Christ. Il nous Parle par Lui et nous devons Le suivre dans l'obéissance sans nous demander comment et pourquoi. Mais ne l'oublions pas, il nous est impossible d'entendre sa douce voix tant que nous n'avons pas fermé nos oreilles aux voix du monde qui nous distrait. Nous ne pouvons pas non plus Le rencontrer et entrer en communion avec Lui tant que nous ne le désirons pas de tout notre coeur. Si nous ne nous taisons pas nous-mêmes. nous ne pouvons entendre ce que d'autres disent et même pour les comprendre parfaitement il est nécessaire que nous leur donnions toute notre attention. De même, pour percevoir la voix de notre Père Céleste, il est de toute nécessité que nous gardions le silence devant Lui, tout notre esprit et tout notre coeur fixés sur Lui, car Il continue à ne se révéler qu'à ceux qui le cherchent diligemment. Alors, ceux qui le chercheront ainsi le trouveront et ils auront le privilège de jouir de la communion des saints comme il arriva aux trois apôtres qui, grâce au Christ, jouirent encore de la communion avec Moïse et ÉLie.

     2. Mais il ne faudrait pas rechercher cette communion simplement parce que c'est un moyen d'avancer dans le monde, à l'instar des deux disciples qui demandaient au Christ le privilège d'être placés à Sa droite et à Sa gauche quand il reviendrait pour régner dans son royaume (Marc X, 35 à 37.)
     Comparez cette attitude avec celle de Marie qui ne pensait pas à occuper une position élevée auprès du trône de son Roi, mais qui se contentait de s'asseoir aux pieds du Seigneur pour écouter ses paroles divines. Elle choisit la bonne part qui ne lui fut point ôtée. (Luc X, -39 à 42.)

     3. Dans la méditation Dieu parle à nos coeurs, mais pas par le moyen de mots. Si nous Lui apportons humblement nos coeurs, Il nous donnera la plénitude que procure le sentiment de Sa présence. Comme la source remplit jusqu'à le faire déborder le récipient placé au-dessous d'elle, ainsi l'esprit et la vraie paix de Dieu remplissent le coeur de celui qui s'abaisse pour les recevoir.
     Hugo a dit : « Le chemin pour monter à Dieu est de descendre en soi-même. » Ainsi parle le Très Haut dont la demeure est éternelle et dont le nom est saint : « J'habite dans les lieux élevés et dans la sainteté, mais je suis avec l'homme contrit et humilié. » (Esaïe 57, 15.)
     Hylton a écrit : « Christ est perdu comme la pièce de monnaie dans la parabole, mais où est-Il perdu ? Dans ta maison, c'est-à-dire dans ton âme. Tu n'as pas besoin. de courir à Rome ou à Jérusalem pour Le chercher, Il dort dans ton coeur, comme Il dormait dans la barque. Réveille-Le avec le cri de ton désir ; quoiqu'il en soit, je crois que pour Lui tu es plus souvent endormi que Lui pour toi. »
     Après être montés dans la solitude de la montagne de la prière et après l'avoir rencontré là, nous n'avons pas la permission de perdre notre temps comme les disciples le faisaient en ébauchant des plans pour la construction de trois huttes. Non, notre devoir est de retourner dans le monde des hommes et d'y porter la puissance nouvelle que. nous avons reçue afin d'accomplir l'oeuvre qui nous est demandée.