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LES SAINTES ÉCRITURES
 
 

« La révélation, c'est la grâce ;
pour éviter la lettre du Livre, de-
mande la grâce, elle t'en fera
comprendre l'esprit. »

(Saint François de Sales).

     Tous les peuples de la terre ont reçu des révélations consolatrices et des secours abondants de la Divinité ; tous ont reçu un Législateur qui leur a parlé au nom du Créateur, et malgré la diversité de leurs mœurs, de leurs opinions et de leur culte, partout se trouvent les mêmes dogmes et les mêmes bases fondamentales. Tous reconnaissent que l'état de misère et de privation de l'homme sur la terre est la conséquence de sa séparation avec le Bien suprême ; chaque révélation souligne l'impuissance de l'homme, livré à ses seules forces, pour retourner vers son Créateur. Et les sacrifices d'animaux attestent assez que les anciens étaient instruits sur ce qui séparait les hommes du Souverain des Esprits : ils savaient que ce sont les passions animales et la vie bestiale.

     Chaque tradition affirme que tous les peuples sont dans l'attente d'une grande époque de délivrance ; or, les traditions ne peuvent varier, car elles sont les témoignages confirmatifs des vérités invariables, antérieures à tous les livres, parce qu'elles sont écrites par l'Éternel dans la nature et dans le cœur de l'homme ; c'est ainsi qu'au moment même de sa chute, le coupable a reçu le germe de sa restauration. L'idée de Dieu serait hors de notre portée s'il n'existait pas de moyen plus direct, pour l'obtenir, que les livres et les traditions.

     L'homme a voulu agir d'une manière distincte de Dieu et il s'est égaré ; de sorte que le point le plus important de toutes les traditions, c'est celui qui présente à cet homme le moyen de connaître sa véritable nature et celui de recouvrer ses droits sublimes. Or, les Saintes Écritures offrent toujours le même remède puisque le mal est le même partout.

     En réalité, les traditions ne sont que l'histoire spirituelle de l'homme ; tout ce qu'elles renferment s'est opéré en lui, c'est le mémorial de son développement ; c'est son histoire traditionnelle, cachée en lui. Aussi, les Saintes Écritures doivent être regardées, non comme la science divine, elle-même, mais comme les avenues de cette science : Elles nous montrent ce qui est dans notre être et que nous n'avons pas toujours le bonheur d'y apercevoir. Et si ces Écritures parlent de tant de choses : de peuples, d'hommes, d'animaux, de plantes, etc.... c'est pour que la parole ouvre la voie d'élection afin que nous devenions vivants intégralement, comme est vivante la nature éternelle. Par notre passage dans les régions mixtes nous nous sommes assujettis au transitoire, au progressif ; auparavant, nous étions activés dans tout notre être. Or, les Écritures sont dans l'obligation de suivre cette progression pour que nous puissions les assimiler.

     Par leurs fréquentes comparaisons, les Traditions font servir la nature comme d'échelons à l'esprit pour s'élever vers la région à laquelle il appartient ; elles empêchent les sens de servir d'obstacle à l'intelligence : Elles sont à couvert aussi des conceptions enfantines, qui semblent renfermer plus de merveilles, entraînant par cela les esprits crédules, et qui cependant, ne sont qu'illusions !

     L'Écriture Sainte, elle, prend l'homme tel qu'il est c'est-à-dire dans sa malheureuse et faible situation ; elle lui transmet les remèdes vivants dont il a besoin. De même que la nature est la tradition des principes invisibles, employés à l'œuvre physique et temporelle, les Traditions vraies sont la nature sensible et physique de Dieu, c'est le levain qui fait germer la vie divine.

     Et, aussi longtemps que l'homme n'a pas reconquis ses prérogatives spirituelles, il peut trouver dans les Écritures, toutes les phases de l'Alliance, qui se tiennent et s'annoncent les unes les autres, afin que tous les temps concourent à ce grand'œuvre ; c'est ainsi que chaque événement de la restauration humaine a toujours un précurseur.

     Mais à mesure que l'homme s'élève dans les degrés de sa restauration, les moyens externes lui deviennent superflus, puisque, se rapprochant de Dieu, les secours intermédiaires doivent disparaître.

     Le but de Moïse, en présentant la Loi, était de faire discerner le mal, en mettant le péché en évidence, en commandant à l'homme de résister aux esprits pervers et d'éviter les convoitises de cette vie terrestre, dans laquelle il s'est précipité volontairement. Mais l'homme était incapable d'amener rien à la perfection avec la Loi de Moïse, car cette Loi n'était pas la sienne. Tout est forcé, tout est contraint dans cette Loi, donnée dans l'enfance de l'Humanité, en attendant que se développe son principe central indépendant.

     Les prophètes, eux, ont eu la mission de signaler la gloire des siècles à venir, pour réveiller en l'homme la foi, l'espérance et le désir ardent de retrouver sa vraie Patrie.

     Moïse et les Prophètes n'ont été que les instruments de la Divinité, aussi, n'ont-ils pu briser les portes scellées pour introduire les humains dans leur véritable royaume ; car seule, la Puissance infinie peut lutter contre elle-même.

     Le Christ, le Sauveur des hommes, en n'écrivant rien, a prouvé qu'Il est esprit et vie, tandis que les écrivains sacrés manifestent qu'ils sont des enfants de l'abîme, des esclaves de la puissance sidérique, dont les fers ont été desserrés ou brisés par la puissance du Verbe ; ce qui leur a permis de parler des choses divines.

     La Loi du Christ est véritablement la loi de l'homme, tout y est volontaire, comme !'a été le sacrifice de la divine Victime : e je vous donne ma vie, personne ne me la ravit, mais je la laisse de moi-même ; j'ai le pouvoir de la quitter et de la reprendre. »

     Comme l'homme est esprit et liberté, la Loi du Christ est esprit et liberté ; comme lui aussi, elle est divine et le mène sûrement à son terme : « Si vous vous remettez sous le joug de la Loi de Moïse, dit Saint Paul, je vous dis que le Christ ne vous sert de rien. »

     L'Ancien Testament avait pour objet la restauration de l'âme humaine, c'est-à-dire l'œuvre de l'homme. Le Nouveau Testament a pour objet l'œuvre de Dieu ; cependant, les instructions et les opérations de Jésus-Christ avant sa mission, et même celle qu'Il donne à SAINT PIERRE après sa résurrection, de faire paître ses brebis, tiennent encore de l'esprit de l'Ancien Testament et ne concernent vraiment que l'œuvre de l'homme. C'est seulement après la Pentecôte, après la venue de l'Esprit-Saint, qui devait tout apprendre aux Apôtres, que le Nouveau Testament s'est réellement ouvert. Et c'est en germe que les hommes en reçurent la clef à cette époque. C'était aux siècles suivants, au nôtre, à manifester les fruits de cette précieuse racine qu'est l'Évangile. Malheureusement, l'érudition humaine n'a pas cessé jusqu'à nos jours d'induire en erreur la masse humaine, sur le but réel et le véritable usage des Écritures Saintes ; alors, les hommes piétinent sur place, encerclés par les maux et les calamités de toutes sortes.

     Le mal est grave, aussi la Divinité est venue encore une fois au secours des pauvres, des malheureux, des hommes de désir qui avaient suspendu leur harpe pour pleurer sur leur détresse. Une dispensation miséricordieuse a été donnée aux Hommes par l'Amour, par la Bonté divine, par l'intermédiaire d'un écrivain simple, à l'esprit droit, Jacob BŒHME, qui révèle la base profonde et mystérieuse de toutes choses.

     Et le divin remède est approprié au mal, à l'état de désordre, de détresse dans lequel se trouve la Religion, étant donné que la sagesse charnelle et la raison humaine ont supplanté la foi vivante et la vie évangélique. Jamais, les hommes ne sont abandonnés de Dieu, de l'infinie Bonté, mais c'est seulement au moment de la maladie réelle que nous sommes disposés à prendre le remède que la Divinité nous envoie.

     La voie du Salut n'exige ni subtilité de l'art ou de la science, ni un entendement cultivé ; tout se produit par le simple mouvement du cœur, par le désir tourné vers Dieu ; aussi l'interprétation des hommes au sujet des vérités cachées dans les Saintes Écritures est plutôt nuisible qu'utile.

     Chaque homme a le pouvoir de se faire ouvrir le sanctuaire des interprétations de l'Esprit même ; et c'est au moyen du miroir vivant que constitue son véritable Principe, que l'homme doit tout apprendre ; car son être purement sensible et matériel ne peut rien lui enseigner, il ne connaît rien, ne retient rien, il ne peut qu'obstruer ses facultés.

     Les bases de l'Ancien et du Nouveau Testaments sont proclamées par l'accord de ces deux écritures :

« Au jour où tu mangeras, dit la Bible, tu mourras. »
« Si un homme ne naît de nouveau de la Parole et de l'Esprit, dit l'Évangile, il ne peut entrer dans le royaume des Cieux. »


     Notre restauration, la loi de mort, a été accomplie par la Divinité elle-même, qui s'est revêtue d'humanité pour nous sauver. Tout a été accompli par l'Amour de Dieu, par la Divine Victime ; dès lors, les règles matérielles ne peuvent plus remplir leur destination ; ces règles étaient liées au temps et le temps leur a enlevé leur efficacité ; comme l'Homme, la Loi doit être dirigée par des principes au-dessus du temps et divins comme lui.

     La vérité n'exige pas une foi aveugle ; chaque chose doit faire sa propre révélation. C'est pour cela que la Divinité s'est fait organe pour que l'homme se repose sur elle volontairement et librement, selon son essence.

     Dès que l'on considère le Christ comme le Sauveur des Hommes et que l'on se demande pourquoi les hommes avaient besoin d'un sauveur, alors, tout ce qui est dit dans l'Évangile devient clair : « Venez, a moi, vous tous qui êtes fatigués et je vous soulagerai. » Ah, combien ces paroles réjouissent l'homme convaincu de la vérité !

     L'Évangile, a dit Jésus, est prêché aux pauvres, c'est-à-dire à ceux qui ont véritablement le sentiment de leur misère sur cette terre d'exil ; ce sont là les seuls capables de l'écouter et de le recevoir. L'Évangile étant un témoignage rendu à la réalité de la vie divine, en même temps qu'il témoigne la mort originelle qui en a privé l'homme, ne peut être, pour celui qui n'a pas le sentiment de sa dégradation, qu'une légende inconsistante. Pour l'homme-animal, la Croix de Christ ne peut être que folie.

     Afin de rendre un véritable témoignage aux Livres Saints, il faut éprouver en réalité dans notre âme, l'action sensible et vivante de ces vérités ; car en parler d'après ce que l'on a lu ou entendu dire, c'est jongler avec des mots ou des idées.

     Le but et le fondement de toutes les traditions, c'est de montrer à l'homme qu'il est mort à la vie divine et qu'il y peut renaître de nouveau ; aussi,nous ne devons pas chercher en elles d'autres leçons que celles qui nous apprennent à discerner le mal, à résister à l'impulsion de notre nature corrompue et à tourner nos cœurs vers Dieu. Aidé de sa véritable base, l'homme le plus ignorant, mais dont le cœur est droit, n'a pas besoin de commentateurs pour l'aider à retirer tous les avantages possibles de l'Écriture Sainte ; il est ainsi préservé de toute erreur dangereuse, jusqu'à ce que la Parole vivante de Dieu, qui n'est point la parole imprimée sur du papier, lui rende la vie, par la naissance en lui de l'Amour, du Fils unique du Père par qui toutes choses ont été faites.

     Et lorsque ce Fils glorieux ressuscite dans l'âme, il ressuscite l'homme mort pour Lui à l'existence bestiale, en le plaçant dans l'éternelle vie de gloire, de félicité et d'amour.
 
 

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