LA GENÈSE UNIVERSELLE

VIII. - LA DIVINITÉ DE JÉSUS-CHRIST






     La divinité de Jésus provient de sa génération éternelle, de la manifestation par lui de ce qui constitue l'essence de Dieu, sa justice infinie.

     Jésus-Christ est celui que les nations ont désiré, celui que les peuples ont attendu ; il est le Verbe de Dieu fait chair, l'image visible de l'Éternel, la face de Dieu même. Il est la seule victime infinie qui pouvait réparer les chutes ; cette Victime divinisée se cache dans la chair de l'homme de péché, pour que s'épuise la peine due au péché sur cette chair, et que l'homme soit rendu à Dieu, comme il est sorti de ses mains.

     La justice de Dieu n'est pas cruauté, elle est amour pour Jésus, elle est pitié pour nous. C'est par amour pour son Fils que le péché est arraché de cette chair de laquelle ce Fils bien-aimé s'est hypostatiquement revêtu, formant une seule personne avec la nature humaine. C'est par justice que la délivrance de l'humanité s'opère puisque la divine Victime et cette humanité forment une Unité.

     Le Dieu-Verbe s'est présenté à l'homme déchu dans son abaissement, dans son incarnation, sur la croix, car cet homme ne pouvait l'atteindre dans sa gloire. C'est sur la croix que le Sauveur reçoit ces malheureux humains. Le Verbe incarné s'est abaissé jusqu'à l'excès, pour montrer Son Père plus grand ; et pour faire paraître la souveraineté et la nécessité de la justice, il s'y est soumis.

     Jésus s'est enveloppé de la mort et s'en est laissé dévorer, pour épuiser ainsi la divine justice ; et sa victoire, sur cette mort puissante, s'est manifestée en absorbant la mort dans la vie. C'est la foi qui découvre le Christ sous la forme de serviteur et d'esclave, sous les haillons de la misère, dont il s'est revêtu pour nous racheter ; la foi découvre sur la croix la divine Victime, elle découvre encore dans les secours que nous recevons, le grand amour de Jésus. Cet amour qui l'a conduit sur le Calvaire pour y consommer son inconcevable sacrifice, pour le triomphe de la gloire infinie du Père et la rémission de la condamnation des hommes.

     Jésus-Christ est Dieu, car s'il n'était Dieu, quelle serait l'efficacité de son sacrifice ? Comment sauverait-il les hommes, comme « homme », alors que les prophètes eux-mêmes ne les ont point sauvés ?
Moïse, Élie, Élisée, ce sont certes des « envoyés », ce ne sont pas des « sauveurs ». Jean le Baptiste était « le plus grand des enfants des hommes », mais il se déclarait « indigne de dénouer la courroie de la sandale » du Christ !

     C'est pourquoi ceux qui se confient à Jésus, à la Parole divine, intarissable source de grâces pour les hommes, ne risquent pas d'être déçus. Il est le sacrificateur éternel, assis à la droite du Père, et la victime sans tache, dont le sang efface les péchés du monde.

     Que nous dit-il ? « je suis la Voie, suivez-moi ! Je suis la Vérité, écoutez-moi ! Je suis la Vie qui veut que vous ressuscitiez ! »

     Quel homme, quel prophète, quel missionné n'osa jamais tenir un tel langage ? Lequel pourrait donner un tel enseignement, et le vivre ?

     Car tout est un en lui. Ses miracles attestent sa puissance ; ses instructions, sa bonté ; ses conseils, sa divine sagesse ; le tout couronné par cette dernière prière : « qu'ils soient un comme nous sommes un ! ». Sous la simplicité de ces mots, accessibles à un enfant, grondent ces abîmes de l'infini qui décourageraient le génie d'un Pascal.

     C'est qu'à chaque homme, quel que soit son degré d'intelligence et de savoir, Jésus offre la vérité essentielle qu'on ne trouve point dans les livres, et que le plus savant, privé du rayon d'En-Haut, ignore autant que l'illettré. C'est qu'il offre à tous un même but final ; un même moyen - à la portée de toute bonne volonté - pour y parvenir. Notre-Seigneur, après avoir été Dieu incarné ou Dieu-Homme, a manifesté la dignité de l'Homme-Dieu ressuscité de qui il est dit : « Ô Dieu, ton trône demeure aux siècles des siècles, et le sceptre de ton royaume est un sceptre d'équité. Tu aimes la justice et tu hais l'iniquité, c'est pourquoi, ô Dieu, ton Dieu t'a oint d'une huile de joie par-dessus tous tes semblables » (Héb. 1, 8). L'Homme-Dieu, le Saint a réparé l'iniquité des hommes, lesquels, en se révoltant contre le commandement de Dieu et sa volonté, avaient fait triompher la leur. Or, notre divin Sauveur fait participer à l'héritage du nom admirable Homme-Dieu tous les hommes de désir, puisque la nature humaine est devenue participante de la grâce, par le Verbe incarné.

     Et cette participation au Verbe, qui n'est pas une identification, est semblable, pour chacun, au reflet d'un beau soir d'été dans un lac.
     Si l'eau est intérieurement boueuse ou agitée extérieurement par la bourrasque, le reflet sera terne, déformé ou nul.

     Et cette similitude va plus loin. Il est des êtres qui ne peuvent connaître de Dieu que le reflet humain de Dieu. Ces satellites spirituels sont groupés par affinités autour de l'astre humain qui leur convient.

     C'est par cet astre qu'ils reçoivent la lumière réfléchie du Soleil de justice.
     Leur responsabilité est liée à l'exactitude du reflet, à la pureté de la lumière transperçue.
     Qu'une entité humaine ne leur offre qu'un reflet hideusement déformé et assombri de la divine lumière, leur responsabilité diminue en proportion, mais, en proportion aussi, augmente celle de l'entité humaine, responsable de leur propre évolution.
     Les disciples du Verbe ont pour mission d'aider tous les êtres à rentrer dans leur béatitude originelle. Ils sont vraiment par participation, ce que leur Maître est par nature.

     Pour le plus grand nombre de ceux qui les approchent et essaient de les comprendre (comme ils agissent ainsi qu'agirait le Christ, vivant en eux), ils apparaissent vraiment comme un aspect du Verbe.
     Il faut être bien avancé, en effet, pour distinguer le Foyer Central de son reflet le plus pur... Les yeux éblouis par le soleil sont aussi éblouis par le reflet du soleil dans un miroir sans défauts.

     Tels sont les vrais disciples, les vrais frères du Seigneur, dont la charité et l'humilité sans bornes font grincer les dents des anges rebelles, en opposition à leur orgueil ce fut la première punition de leur prince qui disait : « Je monterai aux hauts lieux, je serai semblable au Souverain » (Es. XIV, 5).

     Pour faire participer les hommes à l'héritage du nom sacré, il faut que dans chaque homme, Jésus naisse, meure et ressuscite ; le sein de la Vierge, c'est notre âme divine ; l'étable, c'est notre cœur, et les animaux de la crèche ce sont nos passions soumises à l'intelligence. Notre divin Sauveur descend jusqu'à la dégradation où l'homme est plongé. Mais qui peut pénétrer ce mystère d'amour, de propitiations !...

     Il faut, pour que la mort cesse dans l'homme coupable, qu'elle rencontre l'Homme innocent, Jésus-Christ, l'unique cause du salut. Ne pas croire à la divinité, au sacrifice expiatoire de notre divin Sauveur, c'est rejeter le seul moyen qui reste à l'homme pour être arraché aux serres de la mort et obtenir en échange la Vie et la Béatitude.
Jésus-Christ est le fondateur de la religion universelle, toute basée sur le sacrifice, confirmé par son immolation sur la croix. Et comme prêtre éternel de cette religion vraie et intérieure, c'est le Christ qui la réalise dans ceux qui répondent à son appel ; Jésus est à la fois sacrificateur et victime.

     Ayant déjoué toutes les finesses, toutes les ruses de l'Ennemi, le Sauveur est le bouclier de ses disciples ; il a subi, dans son innocente nature, tous les traits et les tourments que cet Ennemi a fait pleuvoir sur lui. Jésus a donc le droit de lier Satan déchaîné contre lui. Il a porté nos langueurs, il s'est revêtu de nos infirmités, et ayant éprouvé la tentation, la divine Victime aide ceux qui la souffrent avec humilité et résignation.

     « Il y a plusieurs demeures dans la maison de mon Père », nous dit le Fils Unique ; s'il n'y avait qu'une demeure, la croyance au Fils serait inutile, il suffirait de croire en Dieu. Or, c'est Jésus qui prépare la demeure de chacun de nous, et qui nous enseigne son chemin ; c'est en vain que nous frapperions à une autre porte. Le Christ prévient ses disciples qu'il retourne à son Père afin de leur envoyer l'Esprit d'amour, l'Esprit de consolation, qui procède du Fils, comme du Père, « mais je retournerai et je Vous prendrai avec moi ». Jésus consolide ainsi par l'espérance la foi en lui. Il prendra ses disciples afin que là où il est, ils y soient aussi.

     Si notre Seigneur ne venait pas nous prendre, comment pourrions-nous être là où il est ?.. Il est dans la maison de son Père, dans le sein de son Père, de l'Être suprême, et nous, nous sommes dans une maison de corruption, dans le domaine de la mort. Le juste s'est soumis volontairement à la peine que doit subir l'injuste ; c'est ainsi qu'il prépare une demeure à l'homme ; et du consentement de son Père, la miséricorde laisse rentrer ceux qui l'implorent ; cette miséricorde appartient à Jésus « Nul ne vient au Père que par, moi », nous dit-il il n'y a donc de salut qu'en lui.

     « Il n'y a, sous le ciel, aucun autre nom qui soit donné aux hommes, par lequel il nous faille être sauvés. » (Act. 11, V. 12).

     Aucun autre nom, en effet, que le nom universel, le Verbe fait chair, dont les noms les plus révérés ne sont que d'imparfaits échos.
 
 
 

Madame D...