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CHAPITRE VII

 


LA VILLE DE STRASBOURG ASSIÉGÉE PAR UN SEUL JUIF

- SUITE -


(LE SIÈGE PUBLIC - 1784 À 1785)



I. Curieux procès et situations incroyables : il se trouve que le Roi est l'allié du juif Cerfbeer par lettres signées, et que Strasbourg, en attaquant le juif, court risque d'attaquer son Roi. - II. La lutte devant le Conseil d'État. - III. Arguments de Cerfbeer et reproches qu'il fait à Strasbourg : reproche de rébellion à la souveraineté du Roi reproche d'égoïsme ; reproche d'inhumanité. - IV. Défense que présente Strasbourg : elle met en avant son vieux droit municipal, et montre que ses rois et le bon roi Louis XVI l'ont toujours respecté, mais que Cerfbeer ose donner aux Lettres patentes qu'il a obtenues une extension arbitraire et perfide. - V. Strasbourg répond aussi avec indignation aux reproches d'égoïsme et d'inhumanité, - VI. Embarras du Roi et de son Conseil devant une décision à prendre. - VII. Manœuvre hardie de Cerfbeer : il passe du siège de Strasbourg au siège de la société tout entière, en insinuant au Roi et au Conseil d'État le projet de l'émancipation des juifs. Cette fois, il réussira.



I



Assurément, ce procès entre un juif qui est parvenu à pénétrer dans une ville fermée à ceux de sa race, et la ville qui veut se débarrasser de ce juif, est unique dans son genre. Les détails très authentiques en sont piquants. Ils sont aussi très instructifs. À l'heure où les juifs envahissent et occupent les avenues de l'ordre social, n'est-il pas curieux et intéressant de pouvoir contempler, dans ce siège en raccourci de Strasbourg, le grand siège qu'ils font présentement de la société civile ?

Cerfbeer, il faut le reconnaître, a manœuvré avec une adresse hors ligne. Toutes ses démarches ne supportent pas le grand jour et ne méritent pas la louange, tant s'en faut Mais il est juste, cependant, de ne pas oublier les difficultés et les côtés délicats de sa situation. C'est un proscrit qui est las de marcher. C'est un paria qui ne veut plus endurer l'exclusion. C'est un homme qu'on met tous les soirs à la porte, comme on mène, à la fin de la journée, les troupeaux à l'étable, et qui veut pouvoir coucher dans une demeure d'homme à Strasbourg. Il se croit donc permis, pour arriver à son but, de prendre des détours, de faire appel à la ruse. Directeur général des fourrages militaires, il connaît le proverbe : Il est permis de ruser à la guerre. C'est un vrai siège qu'il a entrepris. Il se croit excusable, il l'est jusqu'à un certain point.

Cerfbeer se sent, du reste, bien appuyé. Les plus beaux noms de France l'environnent de leur crédit, semblent deviner et encourager son dessein contre Strasbourg, quand ce dessein est encore secret, et l'appuieront ouvertement, quand il sera déclaré et discuté à Versailles, au Conseil du Souverain. Le duc de Choiseul a obtenu à Cerf beer la résidence des hivers â Strasbourg. Le marquis de Monteynard lui a obtenu la résidence des étés. Lorsque l'acquisition de l'hôtel de Ribeaupierre s'est faite secrètement, c'est un lieutenant général des armées du Roi qui lui a prêté le couvert de son nom.

Son Altesse sérénissime le duc de Deux-Ponts, à qui appartenait l'immeuble, a consenti à cette vente dont Elle n'ignorait certainement pas la transmission. Au cours de la procédure à Versailles, d'autres grands noms se déclareront favorables à la cause de l'israélite : marquis d'Argenson, maréchal de Contades, comte de Ségur et comte de Brienne, tous deux successivement ministres d'État. Comment, en compagnie de si beaux noms, Cerfbeer se croirait-il en déficit d'honneur ? Mais ce qui nous a semblé le comble de l'habileté de sa part, c'est qu'il a su mettre le roi Louis XVI de son côté.

En effet, quel singulier spectacle ! Voilà une ville, Strasbourg, qui depuis son incorporation â la France est devenue parfaitement française, toute dévouée à la monarchie ; seulement, elle n'aime pas les juifs, elle n'en veut pas. Eh bien, un fils de cette race a si bien manœuvré, qu'à un moment donné, on aperçoit cette situation incroyable : le Roi du côté du juif par lettres signées, et sa bonne ville obligée, en attaquant le juif, de prendre parti contre son Roi.

Nous le répétons, c'est un épisode unique, un procès qui n'a pas son pareil. En termes de jurisprudence, le mot habile a deux significations : être habile à..., c'est-à-dire avoir des droits ; et être habile, c'est-à-dire déployer de l'adresse, savoir faire. Cerfbeer, en tant que juif, n'était pas habile à devenir propriétaire à Strasbourg ; il s'est alors servi de l'habileté dans l'autre sens, dans le sens d'adresse : il a su faire, et le Roi est avec lui !



II



La lutte commence en 1784, et lorsqu'éclatera la Révolution de 1789, Strasbourg et Cerfbeer seront encore occupés à guerroyer.

Portée au Conseil de Sa Majesté, la contestation se précisait ainsi :

Strasbourg offrait au Roi :

« De ne pas inquiéter le sieur Cerfbeer et ses enfants dans les trois maisons qu'ils occupaient actuellement, à titre de location, pendant tout le temps que Cerfbeer serait chargé de l'entreprise des fourrages de Sa Majesté. Mais une fois l'entreprise terminée, il sortirait de la ville (1). »

Cerfbeer demandait :

« L'exécution des Lettres patentes pures et simple, c'est-à-dire que : ayant plu à Sa Majesté de lui accorder des lettres de naturalisation et de l'admettre an nombre de ses sujets, il n'y avait plus aucune différence entre lui et les autres sujets de Sa Majesté pour tout ce qui concerne les droits de regnicole (habitant du royaume) ; qu'en conséquence il était devenu français, et n'avait pas moins que tout autre sujet français le droit d'habiter Strasbourg, comme toute autre ville (2). »

Ainsi qu'on le voit, Cerfbeer, en belligérant habile, néglige maintenant tous les détails d'un siège lentement mené et va droit au cœur de la question, au but qu'il poursuit : le droit d'habiter Strasbourg. Ses adversaires lui ont reproché de lever le masque. Il le lève, car il déclare « que c'est essentiellement et uniquement pour les lieux où il avait à craindre de la résistance et des obstacles, conséquemment pour Strasbourg, que les Lettres patentes ont été obtenues (3). »

Tel fut le débat porté à Versailles, avec avocats choisis de part et d'autre (4).

Le Conseil du Roi eut là une grosse affaire et dut lire bien des requêtes. Nous avons retrouvé aux Archives nationales tous ces dossiers couverts à la fois de la poussière du combat et de la poussière d'un siècle écoulé depuis, et après eu avoir pris scrupuleusement connaissance, nous croyons pouvoir exposer et préciser cet intéressant débat de la manière suivante.



III



Arguments de Cerfbeer :

Il accusait la ville de Strasbourg sur un triple chef : Le chef de rébellion à la souveraineté du Roi.

Le chef d'égoïsme ;

Le chef d'inhumanité


A. Rébellion à la souveraineté du Roi.


AU ROI

et à Nosseigneurs de son Conseil


« Sire,


« .... Il est clair que les magistrats de Strasbourg contestent à Votre Majesté le droit de récompenser le suppliant dans le lieu où il a eu l'honneur de La servir. Quoi ! l'autorité royale qui a tant de pouvoir pour la punition du crime, n'en aurait point pour la récompense des services ou des vertus (5) ? »

« N'est-il pas singulier de voir un juif stipuler les intérêts de l'État ? Et pourquoi non, puisque le gouvernement les a stipulés avec lui, ces intérêts !........»


Cet argument était d'une habileté extraordinaire. Cerfbeer excitait et piquait la jalousie royale, en se plaignant de ce que les magistrats de Strasbourg voulaient empêcher le Roi de récompenser un sujet comme il l'entendait.

Mais le même argument de l'offense à la souveraineté royale est encore employé par lui avec plus de force, lorsqu'il bat en brèche l'antique et rigoureuse coutume de Strasbourg à l'égard des juifs. « Le magistrat de Strasbourg n'a qu'une seule ressource pour contester an sieur Cerfbeer le droit que lui accordent les Lettres patentes, c'est de contester à Sa Majesté le droit de déroger par des exceptions particulières aux règlements généraux des villes ou des provinces de son royaume, et d'apprécier dans sa justice et sa sagesse, les motifs qui doivent donner lieu à ces exceptions. C'est aussi ce qu'il fait lorsqu'il conteste l'autorité et l'exécution des Lettres patentes accordées an sieur Cerfbeer. Il conteste à Sa Majesté le droit même de souveraineté, avec celui de faire, d'autoriser ou de modifier les règlements qui peuvent concerner la sûreté et la tranquilité de ses sujets. Ainsi, le sieur Cerfbeer en défendant ses droits, ne fait que défendre ceux mêmes de Sa Majesté (6). »

Évidemment, Louis XVI était en quelque sorte obligé de secourir et de se montrer l'allié de Cerfbeer les droits de la Couronne ne sont-ils pas défendus dans le camp d'Israël ? Cerfbeer a si bien manœuvrer, que les magistrats de Strasbourg sont forcés de rencontrer la personne royale, avant d'arriver à l'israélite. Aussi ne craint-il pas de mettre en relief, avec une certaine malice, leur prétention à refuser ce que Sa Majesté a décidé dans ses Lettres patentes (7) ; et un résumé de toute la question, présenté par son avocat, débute par cette interrogation triomphante, embarrassante pour ses adversaires « Le Roi jouit-il des droits de souveraineté sur la ville de Strasbourg ? oui ou non (8) ? » Tout le poids de l'affaire est porté par lui de ce côté-là, et c'est habile !


B. Un autre argument qu'il développe ensuite contre Strasbourg est le reproche d'égoïsme.

Lui, Cerfbeer, fournit les fourrages aux troupes de Sa Majesté dans la province d'Alsace. Strasbourg est plus commode, est même nécessaire comme centre d'opération pour ce service à rendre à Sa Majesté. Mais Strasbourg, s'autorisant d'une coutume surannée, soumet la résidence de faveur de l'israélite à des exigences sans fin, et gêne ses opérations. N'est-ce pas là de l'égoïsme, de l'étroitesse ? N'est-ce pas faire céder l'intérêt général du royaume à l'intérêt particulier d'une ville ?

Cerfbeer développe cet argument avec beaucoup de bonheurs, en l'entrelaçant soigneusement, pour être plus fort, à la souveraineté du roi, point d'appui qu'il ne lâche pas. « Le prétendu privilège (d'exclure les juifs) que réclame le magistrat de Strasbourg, quand même il existerait, ne pourrait avoir pour motif et pour objet que l'intérêt public de la ville. Mais l'intérêt public d'une ville particulière n'est-il donc pas, comme l'intérêt public du royaume, soumis à la sagesse et à l'autorité de Sa Majesté ? N'est-ce donc pas à Sa Majesté, à ses ministres et à son Conseil, qu'il appartient d'établir le règles de même que les « exceptions et les tempéraments que cet intérêt peut demander ? Ce droit et ce soin ne sont-ils pas les attributs de la souveraineté ? Et lorsque Sa Majesté a jugé que le sieur Cerfbeer méritait d'être admis au rang et aux prérogatives d'un de ses sujets ; lorsqu'elle a jugé que cette admission n'était point nuisible à l'intérêt public, et peut-être qu'elle y était favorable. : lorsqu’enfin Sa Majesté a jugé à propos d'accorder cette faveur au sieur Cerfbeer, en dérogeant à toutes règles et lois contraires : convient-il et appartient-il au magistrat de Strasbourg de s'élever, sous des prétextes vagues, qui sont étrangers au sieur Cerfbeer, contre cette décision et cet acte de bonté, de justice et de souveraineté de Votre Majesté (9). »


C. Enfin Cerfbeer met en avant le reproche d'inhumanité. La base de son raisonnement est fausse ; mais sa conclusion est belle et touchante.

La base est fausse, parce qu'il révoque en doute l'épisode de 1349 : le bûcher des juifs brûlés par le peuple de Strasbourg dans leur propre cimetière. « Quoi ! s'écrie-t-il, des magistrats auraient laissé brûler deux mille hommes, sur une simple accusation qui ne pouvait nécessairement regarder que le plus petit nombre de ces victimes, qui n'était point susceptible de preuves, et qui n'offrent que le comble de l'absurdité (l'empoisonnement des puits) ? Un tel jugement eût été mille fois plus criminel que le prétendu crime. Mais ce serait calomnier le fanatisme, père de tant d'horreurs, que de lui imputer cette exécrable inhumanité. Que les magistrats de Strasbourg parviennent à prouver l'authenticité du fait, et le suppliant consent à s'éloigner à jamais de leurs murs (10).... » Il y avait peut-être de l'adresse à mettre ainsi en doute le bûcher des juifs, à décharger Strasbourg du souvenir de cette lamentable exécution ; mais c'était évidemment contraire à l'histoire. Les vieilles archives de la cité n'étaient pas un mensonge ; et, du reste, le nom de rue Brûlée (Brandgasse) donné depuis plusieurs siècles à l'ancien emplacement du cimetière des juifs était un témoignage du lugubre épisode de 1349.

On voit la suite du raisonnement de Cerfbeer : Pourquoi avoir établi, et pourquoi maintenir, sur un crime et sur des représailles absurdes, une coutume aussi inhumaine et aussi outrageante que celle du renvoi des juifs, tous les soirs, des murs de Strasbourg ?

Sa conclusion est fort touchante. Il supplie Louis XVI de le délivrer, non seulement lui Cerfbeer, mais tous ses frères les israélites. « Le suppliant n'ignore pas qu'il est dans sa nation un grand nombre d'individus dignes autant que lui des grâces de Votre Majesté. Il prend le ciel à témoin qu'il aimerait mieux recevoir cette faveur avec ses frères que de la recevoir seul. Mais ce n'est point à lui à plaider une si belle cause, et quelles que puissent être les vues de Votre Majesté, soit que par un reste de pitié pour de vieux préjugés, Elle ne veuille élever les juifs que par degrés au rang de citoyens ; soit que sa main puissante se prépare à briser tout à coup les liens qui tiennent dans le « malheur ce peuple infortuné : le suppliant ne peut que se jeter avec confiance aux pieds de Votre Majesté pour réclamer l'effet des Lettres patentes qu'Elle a daigné lui accorder en 1775, et dont l'exécution n'est combattue que par des prétextes qui attaquent son autorité même et ses droits de souveraineté (11). »

Nous aurons à revenir plus loin sur ces vues de sa Majesté, auxquelles Cerfbeer fait allusion. Bornons-nous ici à l'assaut de Strasbourg.


Encore une fois, tout cela est très adroit. Louis XVI évidemment est embarrassé. Examinons maintenant la défense de Strasbourg.



IV



Avant tout, Strasbourg proteste, mais avec noblesse, de sa soumission aux volontés de son Souverain, et repousse, comme il convient, le reproche de rébellion que lui adresse Cerfbeer.


« Sire,


« Les efforts que Strasbourg oppose à la violence que le sieur Cerfbeer lui fait en voulant s'y établir malgré elle avec sa nombreuse famille, ne sont point, comme il ose le dire, une résistance coupable à l'autorité souveraine... Le magistrat de Strasbourg respecte trop les volontés du Roi pour s'opposer aux grâces qu'il veut bien accorder. Il ne conteste point au sieur Cerfbeer les lettres de naturalité qu'il a obtenues, ni la permission d'acquérir des immeubles dans le royaume. Son unique objet est que la ville de Strasbourg soit maintenue dans le droit dont elle jouit, de temps immémorial, d'écarter de ses murs et des terres de sa juridiction tous les juifs qui voudraient s'y établir (12). »


Strasbourg a protesté de sa soumission et de sa fidélité. Ce devoir rempli, ce souci écarté, elle met vigoureusement et nettement en ligne sou vieux droit municipal. Certbeer, dans son agression, s'était couvert de la souveraineté du Roi comme d'une égide, il avait appuyé son attaque sur les droits de la Couronne : Strasbourg, elle, s'enveloppe de son vieux droit municipal, et appuie sa défense sur ses franchises, respectées des empereurs d'Allemagne et des rois de France. « Les Lettres patentes, dit-elle, qui donnent à Cerfbeer le droit de résider en France et d'y acquérir des biens, sont-elles censées avoir dérogé aux droits d'une ville qui a des statuts particuliers et prohibitifs de la nation juive ? L'on ne pourrait adopter l'affirmative 1° sans autoriser une violence destructive de tous les principes ; 2° sans anéantir l'engagement que le Souverain a pris avec la ville de la maintenir dans ses anciens droits et statuts ; 3° sans violer le droit public d'Allemagne dont Strasbourg faisait partie (13). »

Voilà qui est net et ferme.

Mais après avoir posé ainsi en avant son droit municipal comme un rempart visible et qu'on ne forcera bas, Strasbourg se montre très habile à son tour, aussi habile que Cerfbeer, en ne mettant nullement en doute la justice et la bonté du Roi à son égard par le respect et le maintien de ses statuts : « Comment concevoir qu'un Roi juste voulût affliger sa ville de Strasbourg (14). » Qui donc est le coupable ? Qui donc est le semeur de discordes, le trouble-paix ? N'est ce pas ce juif, dont les manœuvres sont trois fois criminelles ? En effet :

A. Il a donné aux Lettres royales une extension arbitraire, perfide. Si le Souverain avait voulu confondre Strasbourg dans l'effet des Lettres patentes, il en aurait fait une mention expresse. C'est donc l'israélite qui leur a donné une extension arbitraire « sur une ville qui non seulement n'est point comprise dans leur disposition, mais qui ne pourrait y être comprise (15) ». Aussi la ville « n'attaque pas, en aucune manière, les Lettres accordées par le Roi ; elle les laisse subsister dans toutes leurs dispositions : seulement, elle veut empêcher l'extension injuste que Cerfbeer veut, de son autorité privée, leur donner (16). »

B. En agissant comme il a agi, ce juif a abusé d'une grâce, au préjudice d'un tiers (17). « Il n'est point de maxime plus certaine que celle que nulle grâce n'est jamais accordée au préjudice d'un tiers. Dès que l'intérêt d'autrui peut en souffrir, la partie lésée a le droit de réclamer et c'est une dérision, de la part de Cerfbeer, de dire que la Ville se révolte contre l'autorité souveraine parce qu'elle veut que les promesses que lui a faites le Souverain, prévalent sur le caprice d'un particulier qui veut abuser d'une grâce générale pour venir s'établir dans un lieu dont la loi municipale le repousse (18). »

C. Enfin, de quels noms désigner les procédés dont Cerfbeer s'est servi ? Ils sont inqualifiables...

La défense que faisait Strasbourg était, comme on le voit, ferme, habile, respectueuse ; elle écartait avec respect la personne du Roi, et ne ménageait pas Cerfbeer.



V



Là ou principalement Cerfbeer n'est pas ménagé, c'est lorsque Strasbourg, après avoir défini et réclamé ses droits, répond au reproche d'égoïsme et à celui d'inhumanité.

Réponse au reproche d'égoïsme. Cerfbeer, avons-nous vu, avait accusé Strasbourg d'égoïsme parce que, disait-il, dans toute celte affaire, elle faisait céder l'intérêt général du royaume à son intérêt particulier. La fierté de la ville se révolte : « Ainsi, s'écrie-t-elle, c'est d'un juif que le gouvernement apprendra que le bien de l'État demande que les lois générales de France soient abrogées, et que nos Rois ont eu tort de défendre aux juifs, à peine de mort, de résider dans leurs États ! Il faut espérer que ces lois aussi sages ne seront pas révoquées sur les considérations politiques du sieur Cerfbeer, et garantiront à jamais le royaume de l'invasion des juifs. »

« En vain voudrait-on rassurer la ville de Strasbourg contre le fléau qui la menace, en lui disant que l'admission d'un seul juif ne peut l'alarmer ni tirer à conséquence. On voit déjà ce que ce seul juif a fait... D'autres juifs demanderont la même grâce à l'aide de prétendus services rendus aux troupes comme si la nation française manquait d'hommes assez intelligents pour faire les mêmes fournitures ; comme si des juifs étaient capables de rendre le moindre service sans se le faire payer d'avance au centuple. Cerfbeer lui-même n'a-t-il pas fait une fortune immense dans la fourniture de nos armées ? Et il faut encore l'en récompenser ? Il faut que, pour céder à son obstination de demeurer à Strasbourg, le Souverain ébranle la constitution de cette ville, oublie les engagements qu'il a pris de la conserver dans ses anciens droits, et qu'elle consente à recevoir des sangsues qui doivent porter la misère et le désespoir parmi ses concitoyens ? En un mot, ce n'est pas un droit nouveau qu'elle veut acquérir, ce n'est pas un privilège particulier : c'est un droit dont elle est en possession de temps immémorial, un droit enfin qui lui est garanti par les promesses solennelles d'un Souverain qu'elle chérit (19) ! »

La fierté de Strasbourg éclate et déborde dans ces lignes, non moins que son indignation. Elles montent jusqu'au courroux. Malgré sa résolution de s'écarter respectueusement, dans tout ce procès, devant la personne royale de Louis XVI, cette personne royale, il faut en convenir, se trouve quelque peu atteinte. Strasbourg ne blesse-t-elle pas le Roi quand elle dit : « Il faut que, pour céder à ce juif, le Souverain ébranle la constitution de cette ville, oublie les engagements qu'il a pris... » Mais elle tombe vite à ses pieds, quand elle ajoute immédiatement après : « Son droit lui est garanti par les promesses solennelles d'un Souverain qu'elle chérit. » Il est beau de voir le respect enchaîner le courroux, et l'obéissance faire baiser la main qui s'est étendue sur la tête d'un juif qu'on voudrait chasser !

Réponse au reproche d'inhumanité. - Renvoyer ce juif de ses plaintes et de nos murs, il n'y a pas autre chose à faire ! « Qu'il cesse de vouloir rendre le magistrat odieux en criant à l'inhumanité, et en gémissant sur les malheurs de sa nation. Quand cette nation n'aura plus pour principe de violer elle-même les droits de l'humanité, en ruinant par ses rapines les peuples assez imprudents pour la tolérer ; quand elle aura cessé de mériter la qualité d'ennemi déclare du nom chrétien, que lui donne Louis XIV dans son édit du mois de mars 1685 ; quand les juifs auront cessé de dévorer par leurs usures les contrées où ils sont soufferts cette nation pourra invoquer les sentiments d'humanité dus à tous les hommes. Alors la ville cessera de les regarder comme capables d'abuser de l'imprudence du peuple, de la jeunesse, et des militaires nombreux qu'elle renferme dans ses murs, pour s'enrichir de leur substance. »

« Il est peu, à Strasbourg, de procès criminels en usure ou en escroquerie dont les juifs ne soient auteurs, complices ou receleurs. - En ce cas, nous dit-on, faites en bonne justice ! - Mais la punition des coupables rétablira-t-elle la fortune de ceux qu'ils auront ruinés ? N'est-il pas plus sage, plus humain, d'écarter des incendiaires que d'attendre qu'ils aient consommé leur crime pour les en punir ? Le Conseil lui-même a été obligé de venir au secours des peuples d'Alsace, sur lesquels les juifs s'étaient faits pour près de dix millions de créances. Ces usures énormes avaient réduit ces peuples à un tel désespoir qu'il les avait induits à profiter des talents de quelques faussaires pour se procurer des quittances de ce qu'ils devaient. Le désordre a été si grand, que le Conseil supérieur a été obligé d'accorder, à plusieurs reprises, des délais aux débiteurs, et d'instruire nombre de procès criminels et l'on viendra nous dire froidement : admettez les juifs à Strasbourg... oh non (20) ! »



VI



Est-il étonnant, après tout ce que nous venons de rapporter, que Roi et ministres à Versailles se soient trouvés fort embarrassés devant une décision à prendre ? Le Roi veut récompenser Cerfbeer et profiter de cette récompense pour relever l'israélite en l'élevant au rang de citoyen ; mais il ne voudrait pas mécontenter et irriter Strasbourg ! La signature royale a ouvert à Cerfbeer tout le royaume ; mais Strasbourg refuse de s'ouvrir en vertu de son vieux droit municipal ! Si le roi cède et arrête l'effet dc ses Lettres patentes devant les portes de Strasbourg, il paraîtra n'être plus Souverain. S'il exige et étend leur effet au delà des portes, ordonnant la résidence paisible de Cerfbeer dans la ville, il brise avec des engagements pris par la Couronne, il rompt avec le passé et fournit un prétexte à une révolution : car, malgré l'attachement de la ville à son roi, malgré les efforts qu'elle fait pour se retenir dans l'obéissance, il est manifeste qu'une résistance est à craindre ; l'irritation perce à travers les formules de respect.

La situation devint donc fort délicate, et l'embarras à Versailles dut être extrême. Aussi bien, trois choses nous ont prouvé que telle fut la perplexité du Roi et de son Conseil.

D'abord, le temps qu'on mit à l'étude de ce procès. L'affaire fut portée à Versailles en 1784, et elle n'était pas encore terminée quand survint la Révolution de 1789.

Deuxièmement, des pièces authentiques avouent franchement cet embarras. Dans les paperasses du volumineux dossier figurent, en effet, deux lettres confidentielles, adressées au maréchal de Ségur et au comte de Brienne, l'un et l'autre successivement ministres et secrétaires d'État. Ils avaient envoyé en Alsace un commissaire secret pour étudier et arranger l'affaire. Or, le commissaire répondit ce qui suit :


Lettre au maréchal de Ségur.


À Strasbourg, le 20 août 1786.


Monseigneur,


« J'ai reçu la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire le 8 de ce mois, concernant la discussion relative aux Lettres patentes du sieur Cerfbeer. J'obéis à l'ordre qu'elle contient en vous adressant mon avis. D'après la manière dont vous avez bien voulu vous expliquer avec moi sur cet objet de vive voix, j'ai fait différentes tentatives pour amener le magistrat à des voies de conciliation : mes efforts multiplies à cet égard ont été infructueux. Après de nombreuses délibérations et consultations, le magistrat se croit fondé en droit. Il regarde d'ailleurs, ainsi que toute la bourgeoisie, l'admission légale des juifs comme un fléau destructeur du commerce, de l'industrie et du bon ordre. »

« Cette disposition des esprits, Monseigneur, m'a confirmé dans la pensée que cette cause devait être traitée et décidée contradictoirement plutôt que par voie d'administration. Cette forme donnant aux parties les moyens de développer toutes leurs raisons, aucune d'elles n'a le droit de se plaindre, et le magistrat de Strasbourg se trouvera particulièrement par là à couvert des reproches de la bourgeoisie. »

« Je suis avec un profond respect, Monseigneur, Votre très humble et très obéissant serviteur. »

« Signé : GÉRARD (21). »



L'autre lettre est adressée au comte de Brienne qui avait succédé l'année suivante, 1787, au maréchal de Ségur dans le poste de secrétaire d'État. Le bruit courait à Strasbourg que Cerfbeer allait avoir gain de cause ; le même commissaire secret s'empresse d'adresser cette lettre au ministre :


À Strasbourg, le 28 décembre 1787.



Monseigneur,


« L'avocat de la ville vient de mander an magistrat que vous lui avez ordonné de remettre dans ses bureaux les papiers relatifs à Cerfbeer. »

« Je ne puis vous exprimer, Monseigneur, la consternation que cet ordre a répandu parmi le magistrat et la bourgeoisie. On présume que la cause de ce juif est envisagée favorablement. J'ose, Monseigneur, vous dire que toute la ville est en alarme, mais on croit encore pouvoir espérer que, le Roi traitant ses peuples avec tant de bienfaisance, Sa Majesté ne voudra pas user de son autorité absolue pour violer un privilège accordé par les empereurs et confirmé par la capitulation de 1681 (quand Strasbourg se rendit à Louis XIV). La bourgeoisie redoute cet événement comme le fléau le plus destructeur qu'il y ait à appréhender. »

« Je suis avec un respect infini, Monseigneur, Votre très humble et très obéissant serviteur. »

« Signé : GÉRARD (22). »



Nous avons trouvé, sur la lettre même de ce Gérard, ces mots tracés de la main du comte de Brienne indiquant à son secrétaire particulier ce qu'il y avait à répondre.


Répondre : Les craintes de la ville de Strasbourg sont prématurées ; une démarche qui tend seulement à accélérer l'instruction d'une affaire ne doit faire en rien présumer le jugement qui pourra en être porté.

Que l'embarras ait régné à Versailles, ces pièces le prouvent évidemment.

Mais ce qui confirme notre appréciation, c'est, en troisième lieu, l'absence d'un jugement. Nous n'avons rien trouvé comme conclusion, dans les pièces du dossier. La note du comte de Brienne disait : « Le jugement qui pourra en être porté (23). » Il n'a pas été porté. Ce qui nous reste à dire sur ce curieux procès le prouvera péremptoirement.



VII



S'il n'y a pas eu prononcé de jugement, on devine néanmoins que Louis XVI et son Conseil inclinaient pour Cerfbeer. Cela ressort d'une façon transparente :

D'abord, du temps considérable qui fut apporté à ce procès. Si Strasbourg avait dû obtenir gain de cause, aurait-on traîné le procès en pareille longueur ?

Ensuite, des lettres confidentielles citées plus haut : leur contenu est favorable à Cerfbeer ;

Enfin, de la consideration due à la Majesté royale ; Louis XVI voulait demeurer et paraître souverain, et il le paraissait davantage en maintenant sa protection à Cerfbeer. En effet, les Lettres patentes de naturalité, accordées à Cerfbeer, avaient été signées en 1775. Il eût fallu, pour donner tort à l'israélite, infirmer et déjuger en quelque sorte la signature royale, datée de quatorze ans. C'était impossible. Strasbourg suggéra sans doute un expédient, en disant et en répétant à satiété dans toutes ses requêtes que la religion du Roi avait été surprise par ce juif. Mais l'argument n'était pas valable. Cerfbeer, depuis longues années, était fournisseur des fourrages des armées du Roi, le Souverain l'appréciait. En le récompensant, Louis XVI ne pensa peut-être pas à Strasbourg ; mais, en retirant ses Lettres patentes ou en limitant leur effet, il eût donné à croire que sa signature avait été apposée sans réflexion, sans précautions. La Majesté royale ne pouvait pas se déjuger. Il nous paraît donc, sinon évident, du moins plus que probable, que Louis XVI a voulu maintenir à Cerfbeer toute l'étendue de la faveur accordée en 1775.

D'autre part, il est évident que le sensible et bienveillant monarque dut se faire difficilement à l'idée de contrister si profondément sa fidèle ville de Strasbourg. Sa situation présenta, ce semble, quelque chose d'analogue avec celle de ce roi d'Espagne voulant épouser une juive et la faire reine, à cause de sa beauté : les grands du royaume se jettent à ses genoux en lui disant : Sire, vous ne pouvez pas sacrifier l'Espagne à une juive (24). Ici, quoique dans un autre ordre d'idées, les sollicitations ne sont pas moins inquiètes ni moins pressantes. Des requêtes multipliées arrivent de toute une ville pour supplier de la sorte Louis XVI : Sire, vous ne pouvez pas sacrifier Strasbourg à Cerfbeer (25).

Voilà comment s'explique l'absence d'un jugement en cette affaire.

Récompensé sans pouvoir mettre à profit sa récompense, favorisé sans pouvoir jouir de sa faveur, Cerfbeer eut alors une idée hardie. Il y a cette locution dans le langage familier : Faire un trou avec sa tête dans les montagnes, pour signifier un effort violent contre une difficulté qui paraît insurmontable. Avec sa tête dure, Cerfbeer se décida à se tourner contre la société tout entière, pour essayer de la trouer. Il avait mis le siège devant Strasbourg, et, malgré son royal allié, Strasbourg s'obstinait à lui fermer ses portes, à lui refuser une demeure. Par une stratégie que la nécessité lui suggéra, mais où il y eut certainement une permission de la Providence, il transporta le siège devant la société. Les juifs, se dit-il, ne sont pas citoyens, il faut qu'ils le deviennent. Si je réussis, Strasbourg sera bien contrainte de m'ouvrir ses portes. Si je réussis, ce ne sera plus seulement moi Cerfbeer qui pourrai résider et acquérir propriété à Strasbourg, mais tous les juifs ; acquérir propriété à Strasbourg, et partout !

On le voit, c'était agrandir la lutte. Cet homme va devenir vraiment le forceur du droit de propriété. Contrarié devant Strasbourg, après vingt ans d'efforts, il ne se décourage pas ; mais par une conception et une manœuvre pleines d'audace, il va mettre le siège devant la société. Cette fois il réussira.

Louis XVI, auquel il ne révéla certainement pas toute l'étendue de son dessein, n'ignora pas, cependant, la tactique nouvelle de Cerfbeer, et sa manœuvre pour venir à bout du vieux droit municipal de Strasbourg. Non seulement le Roi en eut connaissance, mais même il n'eut pas l'air de le désapprouver. Deux témoignages en sont le garant.

Le premier est la supplique finale de Cerfbeer. Que le lecteur la relise plus haut. L'israélite dit au Souverain : « ... Quelles que puissent être les vues de Votre Majesté, soit que par un reste de pitié pour de vieux préjugés, Elle ne veuille élever les juifs que par degrés au rang de citoyens, soit que sa main puissante se prépare à briser tout à coup les liens qui tiennent dans le malheur ce peuple infortuné (26)...

Un tel langage prouve d'une façon indubitable que, tandis que la lutte continuait encore entre Strasbourg et Cerfbeer, Louis XVI était déjà au courant des démarches de l'intrépide israélite pour faire porter la question dans une sphère supérieure et l'agrandir. Le monarque y avait évidemment consenti ; autrement, Cerfbeer n'aurait pu parler avec tant d'assurance, dans sa supplique, des vues de Sa Majesté. Ces vues qu'il prêtait au Roi prouvaient qu'il y avait des idées à l'étude, et même des entretiens commencés. Un autre passage dans la même supplique laisse voir clairement que Louis XVI connaissait tout, approuvait tout : le suppliant « espère qu'une loi publique ne laissera plus aucun prétexte ni à la ville de Strasbourg, ni à aucune autre ville, de traiter avec tant de rigueur une nation malheureuse, et qu'il ne faudra plus de grâce particulière pour que les juifs puissent être au nombre des sujets de Votre Majesté (27) ».

Du reste, il y a un second témoignage, plus formel encore, du consentement de Louis XVI à cette manière de terminer la lutte entre Strasbourg et Cerfbeer ; ce témoignage, le lecteur le trouvera longuement exposé dans la quatrième partie de ce volume : c'est le projet d'émancipation des juifs, officiellement mis à l'étude par ordre de Louis XVI.

Et maintenant, une réflexion.

Quand le débat entre Cerfbeer et Strasbourg se transforma pour devenir la question de l'émancipation générale des juifs, y eut-il pourparlers directs entre le Monarque et l'israélite ? Nous avons peine à le croire, et aucun papier ne nous autorise à le penser. L'un, quoique très bon, était le Roi ; l'autre n'était qu'un humble juif. Mais la Providence de Dieu, quand elle veut concilier les extrêmes, mettre en rapport ce qui est bien bas avec ce qui est bien haut, crée des intermédiaires sublimes, des traits d'union qui sont comme l'expression de son sourire de miséricorde. Le trait d'union créé par Dieu entre le Roi et le juif allait être Malesherbes.





(1) Arch. nat., K. 1142, n° 69.

(2) Ibid.

(3) Arch. nat., O1, 610.

(4) Ce furent Me Fenoüillot du Closey qui plaida comme avocat de Cerfbeer, et Me Demours, qui défendit Strasbourg.

(5) Requête pour le sieur Cerfbeer à Monseigneur le comte de Brienne, ministre et secrétaire d'État. Arch. nat., 01, 610.

(6) Précis pour le sieur Cerfbeer à Monseigneur le comte de Brienne. Arch. nat., K. 1142, n° 69.

(7) Ibid.

(8) Ibid., n° 70.

(9) Arch. nat., K. 1142, n° 69.

(10) Arch. nat., O1, 610.

(11) Arch. nat., 0', 610.

(12) Arch. nat., K. 1142, n° 68.

(13) Arch. nat., K. 1142, n° 68.

(14) Ibid.

(15) Arch. nat. Ibid.

(16) Ibid.

(17) Ibid.

(18) ibid.

(19) K. 1142, n° 68, Mémoire pour les magistrats de la ville de Strasbourg contre le sieur Cerfbeer, Juif.

(20) K. 1142, n° 68. Mémoire, etc.

(21) Arch. nat., O1, 610.

(22) Arch. nat., 0', 610.

(23) Arch. nat., O1, 610.

(24) « Au XIIe siècle, Alphonse VIII conçut un violent amour pour une jeune et belle juive de Tolède, nommée Rachel, et lui sacrifia ses intérêts et sa gloire. Les coreligionnaires de la favorite profitèrent de cette heureuse circonstance, ils acquirent un grand crédit. Mais leur insolence finit par révolter la cour. Rachel fut assassinée. » MARIANA, liv. XI, ch. XXII. MALO, Hist. des juifs, p. 226. - BAIL, Hist. des juifs, p. 173-4. - MAGNABAL, traducteur de la meilleure histoire des juifs d'Espagne par AMADOR DE LOS RIOS, dit dans une note : « C'est en haine de cette juive que les nobles en vinrent à prendre les armes contre leur roi et assassinèrent sa maîtresse. Toutefois il répugne de croire que, pour manifester au souverain de Castille leur mécontentement sur ce fait, il ait été nécessaire de verser un sang innocent ; cela nous parait monstrueux. » P. 46.

(25) Un suprême effort fut tenté par l'Assemblée provinciale d'Alsace. Une commission fut nommée, composés des noms les plus considérables de la province, qui demanda à intervenir à Versailles, en faveur de Strasbourg contre Cerfbeer (22 janvier 1788). La commission ne changea en rien les dispositions silencieuses du Conseil d'État. - Arch. nat., O1. 610. Requête pour les procureurs-syndics de l'Assemblée provinciale d'Alsace, adressée à Mgr le comte de Brienne, ministre et secrétaire d'État.

(26) Arch. nat., O1, 61.

(27) Ibid.