A UN AMI.

Toi qui cherches en vain ton chemin dans la nuit,
Fuis d'abord des pédants les doctes bavardages
Laisse dormir en paix les livres, lourds d'ennui,
Et, pour mieux accomplir le dur pèlerinage,
Prends le bâton, la lampe et le manteau du sage.


Évade-toi des mots : disputes et discours
Comptent parmi les grands fléaux de cette terre !
Le désir brûle en toi, depuis l'aube des jours,
Le désir brûle en toi d'étreindre l'Éphémère
Sur ton cœur s'est crispé l'ongle de la Chimère


Crains les demi-clartés du monde extérieur,
Les arguments subtils, les dogmes, les écoles
Et laisse parader pitres et bateleurs
Si tout, dans l'Univers, s'exprime par symboles,
Le Maître véridique enseigne sans paroles


Devant le mal, la mort, le crime et la souffrance,
Nus mots, - nos pauvres mots, - sont d'un faible secours !
N'emplis pas ton cerveau d'illusoires sciences
Mais cherche la Lumière en son vivant séjour :
Ton cœur, rouge athanor où bouillonne l'Amour !

                                                                                                 A. S.